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2023, l’année de tous les records climatiques. Pourquoi ?

Xavier Fettweis (*)

Pour la première fois depuis l’aire préindustrielle (1850-1900), le fameux seuil de +1.5°C a été atteint ou presque (+1.48°C signalé par Copernicus (*) à l’échelle globale pulvérisant le précédent record (2017) de +0.17°C. Depuis juillet 2023, c’est en fait tous les jours ou presque que la température bat les précédents records journaliers avec des anomalies à l’échelle globale atteignant parfois les +2°C ces derniers mois. Enfin, la hausse du niveau des mers a fait un « bon » en 2023 en augmentant de presque un facteur deux par rapport aux précédentes années. Si une telle accélération de la hausse du niveau marin a été observée, ce n’est pas à cause d’une fonte subite des calottes polaires mais, à cause de l’expansion thermique des océans qui se sont « subitement » réchauffés en 2023. En Atlantique Nord par exemple, la température de surface a augmenté de +0.4°C par rapport à 2022 alors qu’elle n’avait quasiment plus évolué sur la période 2020-2022. Mais pourquoi un tel emballement des températures des océans, en particulier de l’Atlantique et Pacifique Nord ?

Tout d’abord, il est évident que ces anomalies climatiques sont une conséquence directe du réchauffement global en cours (attribué sans équivoque aux activités humaines par le GIEC). Alors qu’on suivait la médiane des modèles du climat du GIEC depuis quelques années, 2023 sort du lot en atteignant maintenant le percentile 20 % des 30 modèles globaux considérés ici. Selon la médiane des modèles pour le scénario SSP370 (trajectoire +3°C), une anomalie de +1.5°C n’était pas prévue avant 2030 ce qui suggère que d’autres facteurs que le réchauffement climatique ont impactés la hausse des températures en 2023.

Parmi ces autres facteurs, citons d‘abord l’événement El Niño en cours depuis le printemps 2023 empêchant les eaux froides de remonter en surface dans le Pacifique Sud mais expliquant à priori uniquement l’anomalie positive à l’ouest de l’Amérique du Sud.

Comme autre facteur naturel qui pourrait avoir impacté la température, il y a l’éruption du Volcan Tonga (toujours dans le Pacifique Sud) en Janvier 2022 qui a propulsé dans l’atmosphère une importante quantité d’eau qui, rappelons-le, est le gaz a effet de serre le plus puissant. Toutefois, les volcans ont aussi un rôle refroidissant en émettant des aérosols qui vont réfléchir les rayonnements du soleil et favoriser la formation de nuages réfléchissant eux aussi les rayons du soleil. Dans le cas du volcan Tonga, l’effet réchauffant de la vapeur d’eau serait plus fort que celui des aérosols mais tout le monde ne semble pas d’accord sur ce sujet. Sachant que le temps de résidence de la vapeur d’eau et des aérosols émis dans l’atmosphère est à priori inférieur à 1 an, on peut donc supposer qu’il aurait jouer un rôle mineur dans les anomalies de température observées en 2023.

Pour expliquer le réchauffement de l’Atlantique Nord qui n’a jamais été aussi chaud à l’échelle journalière depuis mars 2023, une nouvelle législation dans le transport maritime en 2020 qui a réduit drastiquement la teneur en soufre des carburants des bateaux est souvent pointée du doigt. Ces aérosols de soufre (nocifs pour la santé), comme ceux des volcans, atténuaient le réchauffement des océans jusqu’à maintenant. Même si cela ne fait aucun doute qu’avec moins d’aérosols au-dessus des océans, plus de soleil arrive maintenant à la surface des océans qui se réchauffent donc d’avantage, la diminution de ces aérosols aurait toutefois un impact global d’au plus +0.05°C (*) et ne pourrait donc pas expliquer à elle seule le réchauffement de l’Atlantique Nord et du Pacifique Nord. Notons toutefois que le rôle des aérosols sur la formation de nuages bas est très difficile à évaluer par les modèles du climat car cela fait intervenir des processus sous-maille très dépendants des paramétrisations utilisées dans les modèles, qui pourraient donc sous-estimer leur rôle refroidissant.

Enfin, sachant que le ralentissement observé (*) de la circulation thermohaline (MOOC en anglais) devrait plutôt atténuer le réchauffement de l’Atlantique Nord que l’accélérer, il est aussi possible qu’une rétroaction positive mal prise en compte dans les modèles emballe le réchauffement de l’Atlantique Nord ou alors, que cette accélération du réchauffement n’est que le résultat de la variabilité naturelle du climat liée à l’Oscillation Atlantique Multi-décennale par exemple. L’année 2024 sera donc particulièrement intéressante à surveiller pour vérifier i) si ce réchauffement des océans s’accélère ce qui suggérerait que les modèles sous-estimeraient le réchauffement global ou, ii) au contraire, si on revient dans des conditions plus normales sachant qu’on sera cette année en mode « La Niña » (anomalie froide dans le Pacifique Sud). Dans tous les cas, même s’il y a encore beaucoup d’incertitudes, tout ceci montre que les projections futures ne sont certainement pas trop pessimistes comme beaucoup le pensent mais au contraire, elles sont la fourchette basse de ce qui nous pourrait nous attendre si on ne stoppe pas nos émissions de gaz à effet de serre.



Dixième record

Le dixième record de chaleur mensuel consécutif inquiète et déconcerte les climatologues

Si l’anomalie ne se stabilise pas d’ici le mois d’août, « le monde se retrouvera en territoire inconnu », déclare un expert du climat

Jonathan Watts

Traduction Deepl Josette – The Guardian

Un mois de plus, un nouveau record de chaleur à l’échelle mondiale qui laisse les climatologues perplexes, espérant qu’il s’agit d’un phénomène lié à El Niño et non d’un symptôme d’une santé planétaire plus mauvaise que prévu.

Les températures à la surface du globe en mars étaient supérieures de 0,1 °C au précédent record pour ce mois, établi en 2016, et de 1,68 °C à la moyenne préindustrielle, selon les données publiées mardi par le Copernicus Climate Change Service.

Il s’agit du dixième record mensuel consécutif dans une phase de réchauffement qui a pulvérisé tous les records précédents. Au cours des 12 derniers mois, les températures mondiales moyennes ont été supérieures de 1,58 °C aux niveaux préindustriels.

Ce chiffre dépasse, du moins temporairement, le seuil de 1,5 °C fixé comme objectif dans l’accord de Paris sur le climat, mais cet accord historique ne sera considéré comme violé que si cette tendance se poursuit à l’échelle d’une décennie.

Le Met Office britannique a précédemment prédit que l’objectif de 1,5 °C pourrait être dépassé sur une période d’un an et d’autres organisations de surveillance du climat ont déclaré que les niveaux actuels de réchauffement restaient dans les limites prévues par les modèles informatiques.

Toutefois, la forte augmentation des températures au cours de l’année écoulée a surpris de nombreux scientifiques et suscité des inquiétudes quant à une éventuelle accélération du réchauffement.

Diana Ürge-Vorsatz, l’une des vice-présidentes du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) des Nations Unies, a noté que la planète s’est réchauffée à un rythme de 0,3 °C par décennie au cours des 15 dernières années, soit près du double de la tendance de 0,18 °C par décennie observée depuis les années 1970. « Est-ce dans la fourchette de la variabilité climatique ou le signal d’un réchauffement accéléré ? Je crains qu’il ne soit trop tard si nous attendons de voir », a-t-elle tweeté.

Gavin Schmidt, directeur de l’Institut Goddard d’études spatiales de la NASA, a noté que les records de température sont battus chaque mois de 0,2°C. « C’est une leçon d’humilité et un peu d’inquiétude que d’admettre qu’aucune année n’a autant déconcerté les capacités de prévision des climatologues que 2023 », a écrit le successeur de Jim Hansen dans un récent article publié dans la revue Nature.

M. Schmidt a énuméré plusieurs causes plausibles de l’anomalie : l’effet El Niño, la réduction des particules de dioxyde de soufre refroidissantes due aux mesures antipollution, les retombées de l’éruption volcanique Hunga Tonga-Hunga Ha’apai de janvier 2022 à Tonga, et l’intensification de l’activité solaire à l’approche d’un maximum solaire prévu.

Toutefois, sur la base d’analyses préliminaires, il a déclaré que ces facteurs n’étaient pas suffisants pour expliquer l’augmentation de 0,2 °C. « Si l’anomalie ne se stabilise pas d’ici le mois d’août – ce qui est une attente raisonnable si l’on se réfère aux événements El Niño précédents – le monde se retrouvera en territoire inconnu. Cela pourrait signifier que le réchauffement de la planète modifie déjà fondamentalement le fonctionnement du système climatique, bien plus tôt que les scientifiques ne l’avaient prévu ».

Le cœur du problème – les émissions de combustibles fossiles – est bien connu et largement incontesté par la communauté scientifique. Une enquête portant sur près de 90 000 études liées au climat montre qu’il existe un consensus à 99,9 % sur le fait que l’homme modifie le climat en brûlant du gaz, du pétrole, du charbon et des arbres.

« Pour arrêter le réchauffement, il faut réduire rapidement les émissions de gaz à effet de serre », a déclaré Samantha Burgess, directrice adjointe du Copernicus Climate Change Service.

Michael E. Mann, le scientifique dont le « graphique de la crosse de hockey » de 1999 a montré la forte augmentation des températures mondiales depuis l’ère industrielle, a déclaré que les tendances actuelles étaient prévisibles compte tenu de l’augmentation continue des émissions. Mais il a ajouté que cela ne devait pas être une source de réconfort. « Le monde se réchauffe AUSSI VITE que nous l’avions prédit, et c’est déjà assez grave », a-t-il tweeté.

Ce n’est pas la science qui s’oppose à ce point de vue, mais l’industrie des combustibles fossiles – en particulier les 57 entreprises responsables de 80 % des émissions – qui risque de perdre des milliers de milliards de dollars. Le mois dernier, le directeur général de Saudi Aramco, Amin Nasser, a été applaudi lors d’une conférence de l’industrie pétrolière à Houston pour avoir déclaré : « Nous devrions abandonner l’idée d’éliminer progressivement le pétrole et le gaz ». Cette déclaration a été faite alors que son pays et d’autres avaient accepté, quatre mois auparavant, de renoncer aux combustibles fossiles lors du sommet sur le climat de la Cop28 à Dubaï.



9 juin, participer aux débats

ObsAnt.eu

Le dimanche 9 juin 2024, se dérouleront les élections européennes, fédérales et régionales belges.

L’Observatoire de l’Anthropocène vous aide à participer aux différents débats qui animent ces dernières semaines avant le scrutin.

Deux outils ont été mis en ligne

Juin2024.eu

Sur ces pages, nous collationnons pour vous des références d’articles, de propositions, de mémos et d’informations concrètes. Plus de 200 références.

Un blog reprend des articles en lien avec cette actualité.

En consultant ces pages, mises à jour régulièrement, vous aurez un aperçu des initiatives alternatives aux programmes des partis déjà représentés dans les différents parlements.

https://obsant.eu/juin-2024-blog/

Le Parti climat

Quelles pourraient être les propositions prenant réellement en compte les urgences écologiques et climatiques ?

Comment faire entrer notre société dans le cadre d’une trajectoire sociétale compatible avec les contraintes énergétiques et environnementales ?

Le Parti Climat – projet porté par l’Observatoire de l’Anthropocène – vous propose de retrouver les idées, propositions, programmes, mémorandums, contributions issus d’associations ou de particuliers sur les thèmes de l’écocide, du climat, de l’environnement, la biodiversité et la santé.

Avec le Parti Climat, il vous est possible de participer en proposant – individuellement ou collectivement – vos idées pour une société plus résiliente.

https://obsant.eu/parti-climat/

Un Agenda alternatif est également mis à votre disposition :

https://obsant.eu/events/

Une démocratie, c’est aussi la richesse des débats citoyens.

N’hésitez pas.



Pourquoi la mer est-elle si chaude ?

Elizabeth Kolbert

Article traduit avec DeepL.com (version gratuite) – The New Yorker 15 mars 2024

Une hausse surprenante des températures à la surface de la mer suggère que nous ne comprenons peut-être pas à quelle vitesse le climat change.


Au début de l’année 2023, les climatologues – et tous ceux qui prêtent attention aux données – ont commencé à remarquer quelque chose d’étrange. Au début du mois de mars, les températures à la surface des océans ont commencé à augmenter. En avril, elles avaient établi un nouveau record : la température moyenne à la surface des océans du monde, à l’exception de ceux situés aux pôles, était légèrement inférieure à 70 degrés (fahrenheit soit +- 21,11 degrés Celcius). D’ordinaire, les températures de surface les plus élevées de l’année sont observées en mars, vers la fin de l’été dans l’hémisphère sud. L’année dernière, les températures sont restées anormalement élevées tout au long de l’automne de l’hémisphère sud et au-delà, battant les records mensuels de mai, juin, juillet et d’autres mois. L’Atlantique Nord a été particulièrement chaud ; selon Copernicus, un service spatial de l’Union européenne, les températures dans le bassin étaient « hors normes ».

Depuis le début de l’année 2024, les températures à la surface des océans ont continué à augmenter ; en février, elles ont établi un nouveau record. Dans un monde qui se réchauffe, la température des océans devrait augmenter et continuer à augmenter. Mais au cours des douze derniers mois, les mers ont été si fébriles que les scientifiques commencent à s’inquiéter non seulement de l’impact physique de toute cette chaleur, mais aussi de ses implications théoriques. L’année écoulée peut-elle s’expliquer par ce que l’on sait déjà du changement climatique ou existe-t-il des forces à l’œuvre qui n’ont pas été prises en compte ? Et, dans ce dernier cas, cela signifie-t-il que les prévisions de réchauffement, déjà très sombres, sous-estiment les dangers ?

« Nous ne savons pas vraiment ce qui se passe », m’a dit Gavin Schmidt, directeur de l’Institut Goddard d’études spatiales de la NASA. « Et nous ne savons pas vraiment ce qui se passe depuis le mois de mars de l’année dernière. Il a qualifié la situation d' »inquiétante ».

L’hiver dernier, avant que les températures océaniques n’atteignent leur niveau record, le monde se trouvait dans la phase froide – ou La Niña – d’un schéma climatique désigné par l’acronyme enso. En été, une phase El Niño ou chaude avait commencé. Étant donné que les températures océaniques ont commencé à augmenter avant le début d’El Niño, ce changement ne semble pas suffire à expliquer ce qui se passe. Par ailleurs, l’ampleur des records battus dépasse ce que l’on observe habituellement pendant les El Niños.

« Ce n’est pas comme si nous battions des records de temps en temps », a déclaré Brian McNoldy, chercheur sur les ouragans à l’université de Miami. « C’est comme si l’ensemble du climat avait fait un bond en avant de cinquante ou cent ans. C’est dire à quel point cela semble étrange. On estime qu’en 2023, la teneur en chaleur des deux mille mètres supérieurs des océans a augmenté d’au moins neuf zettajoules. À titre de comparaison, la consommation annuelle d’énergie dans le monde s’élève à environ 0,6 zettajoule.

Plusieurs circonstances et événements ont été cités comme pouvant contribuer à la chaleur anormale de l’année dernière. L’un d’entre eux est l’éruption, en janvier 2022, d’un volcan sous-marin du Pacifique Sud appelé Hunga Tonga-Hunga Ha’apai. Habituellement, les volcans émettent du dioxyde de soufre, qui produit un effet de refroidissement temporaire, et de la vapeur d’eau, qui produit l’effet inverse. Le Hunga Tonga-Hunga Ha’apai a produit relativement peu de dioxyde de soufre, mais une quantité fantastique de vapeur d’eau, et l’on pense que ses effets de réchauffement se font encore sentir.

Un autre facteur est le cycle solaire actuel, connu sous le nom de cycle solaire 25. L’activité solaire s’intensifie – elle devrait atteindre son maximum cette année ou l’année prochaine – et il est possible qu’elle soit également à l’origine d’un réchauffement supplémentaire.

Un autre facteur est la modification de la composition des carburants utilisés pour le transport maritime. Les réglementations entrées en vigueur en 2020 ont réduit la quantité de soufre dans le carburant utilisé par les superpétroliers. Cette réduction a entraîné une diminution d’un type de pollution atmosphérique qui, par des effets directs et indirects, réfléchit la lumière du soleil vers l’espace. On pense que ce changement a entraîné une augmentation de la quantité d’énergie absorbée par les mers, bien qu’il soit difficile de quantifier cet effet.

Tous ces facteurs réunis peuvent-ils expliquer ce qui se passe ? Les climatologues affirment que c’est possible. Le système climatique est également très bruyant. « Il pourrait s’agir d’une simple variabilité naturelle », a déclaré Susan Wijffels, scientifique principale à la Woods Hole Oceanographic Institution.

Mais il se passe peut-être quelque chose d’autre, que les scientifiques n’ont pas encore pris en compte. Ce printemps, l’enso devrait passer à ce que les scientifiques appellent des conditions « neutres ». Si les précédents se confirment, les températures des océans devraient alors commencer à s’aligner davantage sur les tendances à long terme.

« Je pense que le véritable test sera ce qui se passera au cours des douze prochains mois », a déclaré M. Wijffels. Si les températures restent très élevées, je dirais qu’un plus grand nombre de personnes au sein de la communauté s’alarmeront et diront « O.K., c’est en dehors de ce que nous pouvons expliquer ». « 

En 2023, qui a été de loin l’année la plus chaude jamais enregistrée sur terre et dans les océans, de nombreux pays ont connu des vagues de chaleur record, des incendies de forêt record, des tempêtes de pluie record ou une combinaison de ces phénomènes. (L’année dernière, aux États-Unis, vingt-huit catastrophes météorologiques ont causé plus d’un milliard de dollars de dégâts, un autre record). Si les projections climatiques sont exactes, alors l’année a été un avant-goût des choses à venir, ce qui est déjà assez effrayant. Mais si les projections manquent quelque chose, c’est potentiellement encore plus terrifiant, même si les scientifiques ont tendance à utiliser des termes plus mesurés.

« L’autre possibilité est que nous commencions à observer des changements dans la façon dont le système réagit », a observé M. Schmidt. « Toutes les statistiques dont nous parlons sont tirées des données antérieures. Mais rien dans les données antérieures ne ressemblait à 2023. Cela signifie-t-il que les données antérieures ne sont plus prédictives parce que le système a changé ? Je ne peux pas l’exclure, et ce serait évidemment très préoccupant ».



Luttes paysannes

Rencontre entre monde paysan et autres acteurs de la société civile

Nadia Ruchard & Serge Lenaerts

Ma compagne et moi avons une petite boutique bio depuis 2002. Nous y proposons des vêtements, de l’alimentation et de l’artisanat local ou du sud. Le 25 janvier dernier, nous avons participé à une rencontre entre des acteurs du monde paysan et d’autres acteurs de la société civile. Nous avons envoyé aux personnes de nos réseaux, aux client·es de notre magasin, un résumé de cette rencontre. Nous avons contacté quelques magasins bio que nous connaissons pour leur demander de relayer l’information auprès de leur client·es également. Trois d’entre eux l’ont déjà fait. Le résumé que nous avons envoyé se trouve ci-dessous.

Nous avons déjà eu des retours très positifs.

Ce résumé ne reprend pas que des sujets abordés lors de la soirée. Nous avons repris des éléments qui sont communs à l’ensemble des mouvements de luttes paysannes, et également des témoignages de paysans.

Nous allons encore essayer de contacter d’autres magasins bio et d’autres coopératives. Déplaçons la fenêtre d’Overton!

Voici le résumé que nous avons envoyé, avec des éléments supplémentaires pour que celui-ci puisse s’adresser à un public plus large que celui des clients de magasin bio:

« Bonjour à toutes et à tous,

  1. Le monde paysan se mobilise! Le 25 janvier dernier, nous avons participé à une rencontre entre des acteurs du monde paysan (paysans, fédérations, associations…) et d’autres acteurs de la société civile: mouvements écologistes de désobéissance civile, acteurs du commerce alternatif, élus, citoyens et non-citoyens engagés, membres de coopératives alimentaires, associations de lutte contre la précarité alimentaire, collectifs d’interpellation pour la sécurité alimentaire.
  2. Nous vous avons rédigé un résumé de cette rencontre. Nous avons essayé de reprendre tous les points importants pour bien comprendre les enjeux de la mobilisation paysanne actuelle. Nous pensons qu’il est important de vous partager les informations et les demandes auprès de la société civile, issus de cette rencontre.

Les revendications:

  • Stop aux accords de libre-échange et au traité UE-MERCOSUR
  • Des prix justes pour les productions agricoles et pour tous les agriculteur·trice·s
  • Stop aux incohérences des politiques européennes

Les faits:

Ce sont principalement les petites et moyennes fermes qui sont victimes de la globalisation et de l’ultra-libéralisme. Ceci entraîne l’arrivée en Europe d’aliments qui peuvent être vendus moins chers que ceux produits par ces fermes car ils n’ont pas été produits avec des normes aussi strictes qu’en Europe. De plus, elles subissent la pression de la grande distribution qui leur impose un prix d’achat qui ne leur permet plus de couvrir l’augmentation des frais de production suite aux différentes « crises ».

Ces « crises » ont également eu pour impact la diminution de la part consacrée à l’alimentation dans le budget des familles. Puisque à récolte égale, les paysans ont de moins en moins de revenus, ceux-ci doivent produire de plus en plus pour garder le même revenu. Cela est très difficile sans l’utilisation de pesticides et sans mécanisation. D’où, même s’il y a une volonté de la part des paysans de passer en agro-écologie, dans la réalité cela est quasi impossible.

Certains paysans qui pratiquent la culture bio commencent à avoir de plus en plus de difficultés de ne pas vendre une partie de leur production à la grande distribution pour avoir suffisamment de revenus. Certains d’entre-eux ont déjà dû vendre une grande partie de leur récolte à la grande distribution pour pouvoir continuer leur activité.

Une autre revendication des paysans est la diminution de la charge administrative. Celle-ci augmente constamment et prend beaucoup trop de temps par rapport à celui qui devrait être consacré à leur activité. Ce problème atteint quasi tous les métiers. Celui-ci est dû en grande partie à la numérisation, à l’utilisation de technologies de plus en plus complexes et à une volonté d’hyper contrôle de la part des Etats.

Les paysans dénoncent également une injustice dans le système d’attribution des subsides de la PAC qui favorise les grandes exploitations au détriment des plus petites.

Enfin, c’est surtout un manque de sens et de reconnaissance qui conduit parfois jusqu’au suicide. Les paysans les plus mécanisés qui utilisent des hautes technologies, expriment une perte de sens dans ce qu’ils font. Ils constatent qu’ils deviennent de plus en plus un simple rouage au sein d’une méga machine industrielle et qu’ils perdent même petit à petit le contact avec la terre.

Les demandes auprès de la société civile:

Ces acteurs du monde paysans demandent à la société civile de soutenir les petites et moyennes fermes. Et ce peu importe si elles utilisent ou non l’agroécologie comme moyens de production. Celles-ci sont toutes menacées par les méga-fermes-usines de l’agro-industrie transnationale.

Différents moyens de soutien ont été évoqués. En tant que « mangeur·euse·s » d’aliments issus du travail de la terre et en tant qu’utilisateur·trice·s d’objets faits à partir de matières naturelles, qu’ils proviennent du Nord ou du Sud, nous avons le pouvoir d’aider les paysans à se convertir à l’agroécologie.

D’une part, en augmentant de façon conséquente notre part du budget familial consacré à l’alimentation locale, de saison et issus de l’agroécologie (les personnes précarisées devraient recevoir des aides leur permettant d’acheter spécifiquement des aliments issus de l’agroécologie). Ceci permettrait aux paysans d’avoir un revenu qui leur permettrait de vivre de leur production, en produisant des aliments goûtus, bons pour la santé et qui respectent la vie.

Et d’autre part, en prenant une part active dans des actions de légitime défense civile de masse, comme par exemple le démantèlement d’entreprises « illégales » ou des occupations de terres en relais sur une longue durée. Ces entreprises en question peuvent être considérées comme « illégales » dans le sens où celles-ci ont une puissance financière telle qu’elles peuvent se permettre d’être au-dessus des lois. Le corollaire est que ces entreprises s’autorisent elles-mêmes à ne pas respecter les droits humains, ni la vie dans son ensemble.

Celles-ci s’accaparent également des terres cultivables à des prix qu’aucun jeune paysan ne pourrait proposer pour un rachat de terres. Dans le pire des cas, cette puissance financière permet à ces entreprises de convertir par la corruption des terres cultivables fertiles ou des territoires sauvages en terrains destinées à la bétonisation.

Soutenons donc les paysans et les petits producteurs, autant que nous le pouvons, par des achats conscients: locaux, sains, au prix juste et qui respectent la vie!

En tant que cliente, client, coopératrice, coopérateur, responsable de magasin ou de coopérative, mais aussi par le simple fait que nous devons toutes et tous manger et que nous dépendons toutes et tous en partie ou totalement du travail des paysans, défendons-les, mobilisons-nous, engageons-nous, indignons-nous, défendons-nous, démantelons, désarmons et résistons aux méga-fermes-usines de l’agro-industrie transnationale.

Soyons solidaires et œuvrons ensemble pour une société plus juste et pour un monde où nos enfants et descendants seront heureux de vivre !

N’hésitez-pas à partager ! »



Février en passe de battre un nombre sans précédent de records de chaleur

Jonathan Watts

Traduction Deepl Josette – The Guardian

Le mois de février est en passe de battre un nombre record de records de chaleur, selon les météorologues, car le réchauffement climatique d’origine humaine et le phénomène naturel El Niño font grimper les températures sur terre et dans les océans.

À un peu plus de la moitié du mois le plus court de l’année, le pic de chaleur est devenu si prononcé que les cartes climatiques entrent dans un nouveau territoire, notamment en ce qui concerne les températures de surface de la mer qui ont persisté et se sont accélérées au point que les observateurs experts ont du mal à expliquer comment ce changement se produit.

« La planète se réchauffe à un rythme accéléré. Nous assistons à des augmentations rapides de la température dans l’océan, le plus grand réservoir de chaleur du climat », a déclaré le Dr. Joel Hirschi, responsable associé de la modélisation des systèmes marins au Centre national d’océanographie du Royaume-Uni. « L’amplitude avec laquelle les précédents records de température de surface de la mer ont été battus en 2023 et maintenant en 2024 dépassent les attentes.
La compréhension des raisons de ce phénomène fait l’objet de recherches permanentes. »

Selon Zeke Hausfather, spécialiste des sciences de la Terre à Berkeley, l’humanité est en passe de connaitre le mois de février le plus chaud de l’histoire, après des mois de janvier, décembre, novembre, octobre, septembre, août, juillet, juin et mai records.

Selon lui, l’augmentation observée ces dernières semaines devrait entrainer un réchauffement de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels, mais il devrait s’agir de l’impact maximal et bref d’El Niño s’il suit la voie tracée les années précédentes et commence à se refroidir dans les mois à venir.

Ce serait normalement une bonne nouvelle si La Niña, qui fait baisser les températures, suivait, mais M. Hausfather a déclaré que le comportement du climat était devenu plus erratique et plus difficile à prévoir. « L’année dernière a tellement défié les attentes qu’il est difficile d’avoir autant confiance dans les approches que nous avons utilisées pour faire ces prévisions dans le passé », a-t-il déclaré. « Je dirais que février 2024 est bien placé pour battre le précédent record établi en 2016, mais ce n’est pas du tout gagné d’avance à ce stade, car les modèles météorologiques suggèrent que les températures mondiales vont redescendre au cours de la semaine à venir. Je pense donc que ces températures extrêmes sont la preuve d’une accélération du réchauffement au cours des dernières années – comme le prévoient les modèles climatiques si les émissions de CO2 ne diminuent pas mais que les aérosols le font – mais que la situation n’est pas nécessairement pire que ce que nous pensions. »

La première moitié du mois de février a choqué les observateurs météorologiques. Maximiliano Herrera, qui tient un blog sur les températures extrêmes dans le monde, a qualifié de « fou », de « folie totale » et de « réécriture de l’histoire du climat » la vague de milliers de records de chaleur enregistrés par les stations météorologiques. Ce qui l’a étonné, ce n’est pas seulement le nombre de records, mais aussi l’ampleur avec laquelle nombre d’entre eux ont dépassé tout ce qui avait été enregistré auparavant.

Au Maroc, 12 stations météorologiques ont enregistré des températures supérieures à 33,9 °C, ce qui constitue non seulement un record national pour la journée d’hiver la plus chaude, mais aussi plus de 5 °C de plus que la moyenne pour un mois de juillet. La ville de Harbin, dans le nord de la Chine, a dû fermer son festival hivernal de la glace parce que les températures ont dépassé le point de congélation pendant trois jours sans précédent ce mois-ci.

Au cours de la semaine dernière, des stations de surveillance aussi éloignées les unes des autres que l’Afrique du Sud, l’Arabie saoudite, la Thaïlande, l’Indonésie, le Kazakhstan, la Colombie, le Japon, la Corée du Nord, les Maldives et le Belize ont enregistré des records de chaleur mensuels.

Au cours de la première moitié de ce mois, 140 pays ont battu des records de chaleur mensuels, ce qui est similaire aux chiffres finaux des six derniers mois les plus chauds de l’année 2023 et plus de trois fois supérieur à tous les mois antérieurs à 2023.

La chaleur à la surface des océans continue d’étonner les observateurs chevronnés et laisse entrevoir des tempêtes intenses plus tard dans l’année. Le spécialiste des ouragans Michael Lowry a tweeté que les températures de surface de la mer dans la principale région de développement de l’Atlantique, où se forment la plupart des ouragans américains de catégorie 3 ou plus, « sont aussi chaudes aujourd’hui à la mi-février qu’elles le sont généralement à la mi-juillet. Incroyable ».

Selon M. Hirschi, les températures de surface de la mer se trouvent en « territoire inconnu ». Il s’attend à ce que le mois de mars batte le record du mois d’août dernier de 0,1 à 0,2 °C. Le mois de mars est généralement la période la plus chaude de l’année pour les océans, car c’est la fin de l’été dans l’hémisphère sud, où se trouvent la plupart des grandes mers du monde.

Les pics de température étaient attendus, mais leur amplitude a surpris. Les climatologues étudient actuellement la manière d’attribuer un poids aux différentes causes de ces anomalies.

Un puissant El Niño a fait grimper les températures, mais Francesca Guglielmo, scientifique principale chez Copernicus, a fait remarquer qu’il ne s’agissait que d’un facteur de réchauffement parmi d’autres qui agissaient conjointement. Chaque tonne supplémentaire de dioxyde de carbone émise par l’humanité accroît la pression sur les océans. Dans certaines régions, la chaleur anormale a également été intensifiée par la faiblesse des alizés, la léthargie du jet stream, les fluctuations de la circulation dans l’Atlantique Nord et la réduction de la pollution par les aérosols, qui expose une plus grande partie de l’océan au soleil.

Katharine Hayhoe, scientifique en chef de The Nature Conservancy, a déclaré que l’incertitude quant à l’interaction des différents facteurs nous rappelle que nous ne comprenons pas tous les aspects de la manière dont le système terrestre complexe réagit à un forçage radiatif sans précédent. « Cela se produit à un rythme beaucoup plus rapide que tout ce qui a été documenté dans le passé », a-t-elle déclaré. « Il est beaucoup plus probable que nous sous-estimions l’impact de ces changements sur la société humaine que nous ne le surestimions. »

El Niño est en train de s’affaiblir, ce qui devrait faire baisser les températures dans le Pacifique équatorial à partir de la fin du printemps ou du début de l’été. Si l’Atlantique Nord reste chaud à ce moment-là, cela pourrait annoncer une activité cyclonique intense, a averti M. Hirschi.

Ces risques augmenteront chaque année si les émissions de carbone d’origine humaine ne sont pas réduites et si le déboisement n’est pas inversé. « Ralentir, arrêter ou inverser la trajectoire de réchauffement sur laquelle nous sommes engagés revient à changer le cap d’un supertanker. Les résultats ne sont pas immédiats, mais plus tôt nous agirons, plus il nous sera facile d’éviter les problèmes », a-t-il déclaré.



AMOC

Le système critique des courants de l’océan Atlantique montre des signes précoces d’effondrement, ce qui a incité les scientifiques à lancer un avertissement.

Laura Paddison

Traduction – deepl Josette – source : CNN

Selon un nouveau rapport, un système crucial de courants océaniques pourrait déjà être sur le point de s’effondrer, ce qui aurait des conséquences alarmantes sur l’élévation du niveau de la mer et sur le climat mondial, entraînant une chute spectaculaire des températures dans certaines régions et une hausse dans d’autres.

En utilisant des systèmes informatiques exceptionnellement complexes et coûteux, les scientifiques ont trouvé un nouveau moyen de détecter un signal d’alerte précoce pour l’effondrement de ces courants, selon l’étude publiée vendredi dans la revue Science Advances. Et comme la planète se réchauffe, il y a déjà des indications que la situation évolue dans cette direction.

La circulation méridienne de retournement de l’Atlantique (AMOC en anglais), dont fait partie le Gulf Stream, fonctionne comme un gigantesque tapis roulant mondial, transportant les eaux chaudes des tropiques vers l’Atlantique Nord, où l’eau se refroidit, devient plus salée et s’enfonce dans les profondeurs de l’océan, avant de se propager vers le sud.

Les courants transportent la chaleur et les nutriments vers différentes régions du globe et jouent un rôle essentiel dans le maintien d’un climat relativement doux dans de grandes parties de l’hémisphère nord.

Depuis des décennies, les scientifiques tirent la sonnette d’alarme quant à la stabilité de la circulation, car le changement climatique réchauffe les océans et fait fondre la glace, perturbant l’équilibre entre la chaleur et le sel qui détermine la force des courants.

Si de nombreux scientifiques pensent que l’AMOC ralentira sous l’effet du changement climatique, et pourrait même s’arrêter, il subsiste une grande incertitude quant au moment et à la vitesse à laquelle cela pourrait se produire. L’AMOC ne fait l’objet d’une surveillance continue que depuis 2004.

Les scientifiques savent, grâce à l’élaboration d’une image du passé à l’aide de carottes de glace et de sédiments océaniques, que l’AMOC s’est arrêtée il y a plus de 12 000 ans à la suite d’une fonte rapide des glaciers.

Aujourd’hui, ils s’efforcent de déterminer si cela pourrait se reproduire.

Cette nouvelle étude constitue une « avancée importante », a déclaré René van Westen, chercheur en sciences marines et atmosphériques à l’université d’Utrecht, aux Pays-Bas, et coauteur de l’étude.

Les scientifiques ont utilisé un superordinateur pour faire tourner des modèles climatiques complexes sur une période de trois mois, simulant une augmentation progressive de l’eau douce dans l’AMOC – représentant la fonte des glaces ainsi que les précipitations et le ruissellement des rivières, qui peuvent diluer la salinité de l’océan et affaiblir les courants.

En augmentant lentement la quantité d’eau douce dans le modèle, ils ont vu l’AMOC s’affaiblir progressivement jusqu’à ce qu’il s’effondre brusquement. C’est la première fois qu’un effondrement est détectable à l’aide de ces modèles complexes, ce qui constitue « une mauvaise nouvelle pour le système climatique et l’humanité », selon le rapport.

En revanche, l’étude ne donne pas de calendrier pour un éventuel effondrement. D’autres recherches sont nécessaires, a déclaré M. van Westen à CNN, notamment des modèles qui imitent également les effets du changement climatique, tels que l’augmentation des niveaux de pollution réchauffant la planète, ce qui n’était pas le cas dans cette étude.

« Mais nous pouvons au moins dire que nous nous dirigeons vers le point de basculement du changement climatique », a déclaré M. van Westen.

Les conséquences de l’effondrement de l’AMOC pourraient être catastrophiques. Selon l’étude, certaines régions d’Europe pourraient voir leurs températures chuter de 30 degrés Celsius en l’espace d’un siècle, ce qui donnerait lieu à un climat complètement différent en l’espace d’une ou deux décennies seulement.

« Aucune mesure d’adaptation réaliste ne peut faire face à des changements de température aussi rapides », écrivent les auteurs de l’étude.

Les pays de l’hémisphère sud, quant à eux, pourraient connaître un réchauffement accru, tandis que les saisons humides et sèches de l’Amazonie pourraient s’inverser, ce qui perturberait gravement l’écosystème.

L’effondrement de l’AMOC pourrait également entraîner une hausse du niveau des mers d’environ 1 mètre, a déclaré M. van Westen.

Stefan Rahmstorf, océanographe physique à l’université de Potsdam en Allemagne, qui n’a pas participé à l’étude, a déclaré qu’il s’agissait d’une « avancée majeure dans la science de la stabilité de l’AMOC ».

« Cela confirme que l’AMOC a un point de basculement au-delà duquel il s’effondre si l’océan Atlantique Nord est dilué avec de l’eau douce », a-t-il déclaré à CNN.

Les études précédentes qui ont permis de trouver le point de basculement de l’AMOC ont utilisé des modèles beaucoup plus simples, a-t-il ajouté, ce qui a donné à certains scientifiques l’espoir de ne pas trouver ce point de basculement avec des modèles plus complexes.

Cette étude anéantit ces espoirs, a déclaré M. Rahmstorf.

Joel Hirschi, responsable associé de la modélisation des systèmes marins au Centre national d’océanographie du Royaume-Uni, a déclaré que cette étude était la première à utiliser des modèles climatiques complexes pour montrer que l’AMOC peut basculer de « on » à « off » en réponse à des quantités relativement faibles d’eau douce entrant dans l’océan.

Mais il y a des raisons d’être prudent, a-t-il ajouté. Même si l’étude a utilisé un modèle complexe, sa résolution reste faible, ce qui signifie que la représentation de certaines parties des courants pourrait être limitée.

Cette étude vient s’ajouter au nombre croissant de preuves indiquant que l’AMOC pourrait s’approcher d’un point de basculement – et qu’il pourrait même être proche.

Une étude réalisée en 2021 a révélé que l’AMOC n’avait jamais été aussi faible au cours des 1 000 dernières années. Et un rapport particulièrement alarmant – et quelque peu controversé – publié en juillet de l’année dernière, a conclu que l’AMOC pourrait être en passe de s’effondrer dès 2025.

Pourtant, d’énormes incertitudes subsistent. Jeffrey Kargel, scientifique principal au Planetary Science Institute en Arizona, a déclaré qu’il pensait que la théorie d’un arrêt potentiellement imminent de l’AMOC « resterait quelque peu controversée jusqu’à ce que, un an plus tard, nous sachions que c’est bien le cas ».

Il a comparé son effondrement potentiel aux « folles fluctuations d’un marché boursier qui précèdent un grand krach » – il est presque impossible de déterminer quels changements sont réversibles et lesquels sont les signes avant-coureurs d’une catastrophe.

Les données modernes montrent que la force de l’AMOC fluctue, mais il n’y a pas encore de preuve observée d’un déclin, a déclaré M. Hirschi. « La question de savoir si des changements brusques de l’AMOC similaires à ceux observés dans le passé se produiront à mesure que notre climat continuera à se réchauffer est une question importante qui reste ouverte. »

Cette étude est une pièce du puzzle, a déclaré M. Rahmstorf. « Elle renforce considérablement l’inquiétude croissante concernant l’effondrement de l’AMOC dans un avenir relativement proche », a-t-il déclaré. « Nous ignorerons ce risque à nos risques et périls. »


Documentation : Obsant



Sans Transition

Une nouvelle histoire de l’énergie

Jean-Baptiste Fressoz


Une lecture essentielle 

Ce livre est né d’un malaise ressenti à la lecture des histoires générales de l’énergie. Alors que le charbon vient de connaître un immense essor sur la plupart des continents, des ouvrages universitaires de référence sur le sujet racontent encore des histoires de transition entre systèmes énergétiques. …

Dès les premiers mots, le challenge est posé. L’auteur nous propose un autre regard sur l’histoire des énergies. Et cela commence par l’évocation de l’évolution des consommations de chaque ressource énergétique, dans l’ensemble de leurs usages.

Fortement documenté, l’ouvrage permet de prendre la mesure des progressions de différentes ressources. En valeurs absolues. Et de comparer les enseignements de leurs visualisations avec la présentation de mêmes sources en valeurs relatives.

L’évolution en symbiose des différentes sources d’énergies s’impose et amène l’auteur à retracer pas à pas la genèse du récit de l’évolution en phases qui domine pourtant encore à ce jour.

Nous entrons alors dans l’histoire passionnante des analyses et prospectives qui se sont succédé et les impacts sur certains choix politiques majeurs.

Pour finir, on suit les influences directes des débats énergétiques sur le débat climatique. Cheminement qui révèle quelques parcours individuels marquants dans le fonctionnement du GIEC et questionne la méthodologie de travail de certains groupes en son sein.

Une lecture indispensable pour celles et ceux qui s’intéressent à l’énergie, aux prospectives globales et au Climat.

Paru au Seuil – écocène


Documentation : obsant


Un document d’information révèle que le ministre a consulté BP sur les mesures incitatives visant à maximiser la production de pétrole.

C’est une exclusivité : La réunion a eu lieu quelques jours après que BP a annoncé des bénéfices records, alors que les ménages devaient faire face à des factures d’énergie élevées.

Damian Carrington

Traduction deepl Josette – article original sur The Guardian

Le ministre de l’énergie et du climat, Graham Stuart, a interrogé BP sur les mesures incitatives nécessaires pour « maximiser » l’extraction de pétrole et de gaz en mer du Nord. C’est ce que révèlent des documents publiés en vertu des règles de liberté de l’information.

La rencontre de M. Stuart avec la patronne britannique de l’entreprise, Louise Kingham, l’année dernière, a eu lieu quelques jours après que BP a annoncé un bénéfice record de 28 milliards de dollars (23 milliards de livres sterling) pour 2022, a augmenté son dividende aux actionnaires et est revenu sur son objectif de réduire ses émissions de carbone d’ici à 2030. Les ménages ont également dû faire face à des factures d’énergie très élevées. BP présentera ses bénéfices pour 2023 mardi.

M. Stuart a également demandé à Mme Kingham de lui donner des conseils pour faire valoir que la production pétrolière britannique était « bonne » et qu’elle s’inscrivait dans le cadre de la transition vers le net zéro. Les experts ont réfuté à plusieurs reprises les arguments selon lesquels la nouvelle production de pétrole et de gaz pouvait renforcer la sécurité énergétique du Royaume-Uni ou faire baisser les prix.

Mercredi dernier, l’organisme britannique chargé du pétrole et du gaz a accordé 24 nouvelles licences de forage à BP et à d’autres sociétés, après les 27 licences accordées en octobre, et d’autres devraient suivre dans les mois à venir. Le président des conseillers britanniques officiels en matière de climat a déclaré en janvier que « l’octroi de nouvelles licences n’est pas compatible avec les objectifs climatiques ». L’Agence internationale de l’énergie a déclaré en 2021 que toute nouvelle exploitation de combustibles fossiles était incompatible avec l’objectif de zéro émission nette d’ici à 2050.

« Les forages pétroliers en mer du Nord compromettront les engagements du Royaume-Uni en matière de climat et ne garantiront pas la sécurité énergétique. Pourtant, le ministre a cyniquement sollicité l’aide de BP pour tenter de « gagner » l’argument contraire », a déclaré Chris Garrard, de l’organisation de campagne et de recherche Culture Unstained, qui a introduit la demande d’accès à l’information.

« Ce qui est encore plus troublant, c’est que quelques jours après que BP ait annoncé des bénéfices records, il semble assurer à BP qu’il y a des incitations et de l’argent pour continuer à faire circuler ses combustibles fossiles polluants, alors que le public a du mal à payer ses factures d’énergie », a-t-il ajouté.

Les documents rendus publics comprennent un compte-rendu fortement expurgé d’une réunion entre Stuart et Kingham le 17 février 2023. M. Stuart a posé la question suivante : « Où pensez-vous que nous en soyons en termes de mise en place des bonnes mesures incitatives pour maximiser la récupération de la mer du Nord et continuer à défendre l’argument selon lequel produire au Royaume-Uni est une bonne chose, et fait partie de la transition vers le zéro net, afin de s’assurer que nous minimisons nos importations ? »

Il a déclaré : « L’argent est là, il faut créer des incitations et des structures pour le faire circuler. »

M. Stuart a également demandé à Mme Kingham de lui fournir des informations à utiliser pour plaider en faveur d’une nouvelle production en mer du Nord : « Nous utiliserons du pétrole et du gaz et, si nous ne le faisons pas nous-mêmes, nous dépenserons cet argent ailleurs. En additionnant tout cela, j’aimerais avoir un chiffre indiquant si nous voulons vraiment dépenser x milliards pour dépendre des importations étrangères ».

De larges pans des réponses de Mme Kingham ont été expurgés, les représentants du gouvernement invoquant des « informations commercialement confidentielles ». Mais elle a déclaré : « Idéologiquement, il faut réfléchir où l’on peut mettre en place des taxes ou des incitations, parce que vous n’obtiendrez pas d’investissements ». Elle a également déclaré que BP était « fière de son travail, des emplois qu’elle crée et des barils toujours plus propres », ajoutant que l’argument serait « amplifié par certains médias sociaux et certaines publicités ».

Tessa Khan, du groupe de campagne Uplift, a déclaré : « BP a du culot de dire à notre gouvernement que l’industrie a besoin de plus d’allègements fiscaux et de subventions ou qu’elle n’investira pas, au milieu d’une crise du coût de la vie provoquée par les factures d’énergie et alors qu’elle vient d’annoncer un bénéfice de 28 milliards de dollars ».

« Ce qui est vraiment scandaleux, c’est que le ministre répond que « l’argent est là » pour les géants pétroliers qui font des profits, alors qu’il vient de supprimer une aide vitale à des millions de ménages qui n’ont littéralement pas les moyens de chauffer leur maison », a-t-elle ajouté. « Il n’y a aucun doute quant au camp qu’a choisi ce gouvernement. »

Un porte-parole du gouvernement a déclaré : « Le ministre Stuart a tout à fait raison de soutenir le pétrole et le gaz domestiques, car le Royaume-Uni continuera à utiliser du pétrole et du gaz même lorsque nous aurons atteint le niveau zéro en 2050. C’est bon pour notre sécurité énergétique, cela soutient jusqu’à 200 000 emplois et a rapporté 400 milliards de livres de recettes fiscales à ce jour [au cours des 50 dernières années], qui ont été utilisées pour aider les familles à faire face au coût de la vie et pour financer les services publics. Les 6 milliards de livres sterling générés par la taxe sur les profits énergétiques imposée aux producteurs de pétrole et de gaz ont permis à eux seuls de payer environ la moitié de la facture énergétique d’un ménage type l’hiver dernier. »

« Les ministres continueront à rencontrer les entreprises du secteur de l’énergie afin d’encourager les investissements au Royaume-Uni et de mettre fin à la dépendance à l’égard des importations étrangères coûteuses de gaz naturel liquéfié, dont les émissions sont plus élevées », a-t-elle déclaré.

Un porte-parole de BP a déclaré : « BP est une grande entreprise dont le siège social se trouve au Royaume-Uni et qui prévoit d’investir de manière significative dans les systèmes énergétiques et la transition énergétique du pays. À ce titre, nous avons des réunions régulières avec les ministères. Cette discussion a porté sur la manière dont le Royaume-Uni pourrait continuer à attirer les investissements et à maintenir le rythme après l’adoption de la loi américaine sur la réduction de l’inflation, tant dans le système pétrolier et gazier actuel que dans les projets d’énergies renouvelables et à faibles émissions de carbone. La loi soutient les énergies renouvelables.

Les entreprises de combustibles fossiles ont reçu 80 milliards de livres sterling de soutien du gouvernement britannique depuis 2015. La plupart des 24 nouvelles licences de forage ont été accordées à des entreprises étrangères. Vendredi, il a été révélé qu’une entreprise pétrolière et gazière appartenant à un important donateur conservateur, qui avait déjà été condamnée à une amende pour brûlage illégal, s’était vu attribuer l’une des licences de forage.

En janvier, l’ancien ministre conservateur de l’énergie, Chris Skidmore, a démissionné de son poste de député pour protester contre la ruée du parti vers le pétrole et le gaz, qualifiant cette politique de « tragédie » qui est « erronée et qui causera des dommages à l’avenir ».



Le passage à des systèmes alimentaires durables pourrait rapporter 10 000 milliards de dollars par an

Selon les chercheurs, la production actuelle détruit plus de valeur qu’elle n’en crée en raison des coûts médicaux et environnementaux.

Jonathan Watts

Deepltraduction Josette – The Guardian

Une transition vers un système alimentaire mondial plus durable pourrait générer jusqu’à 10 000 milliards de dollars de bénéfices par an, améliorer la santé humaine et atténuer la crise climatique, selon l’étude économique la plus complète de ce type.

L’étude révèle que les systèmes alimentaires actuels détruisent plus de valeur qu’ils n’en créent en raison des coûts environnementaux et médicaux cachés, ce qui revient à emprunter sur l’avenir pour engranger des bénéfices aujourd’hui.

Les systèmes alimentaires sont à l’origine d’un tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre, ce qui laisse présager un réchauffement de 2,7 °C d’ici la fin du siècle. Cela crée un cercle vicieux, car la hausse des températures entraîne des conditions météorologiques plus extrêmes et des dégâts plus importants sur les récoltes.

L’insécurité alimentaire pèse également sur les systèmes médicaux. L’étude prévoit qu’en cas de statu quo, 640 millions de personnes souffriront d’insuffisance pondérale d’ici à 2050, tandis que l’obésité augmentera de 70 %.

Selon l’équipe internationale à l’origine de l’étude, réorienter le système alimentaire serait un défi politique, mais apporterait d’énormes avantages économiques et sociaux. Cette étude se veut l’équivalent alimentaire du rapport Stern, l’examen des coûts du changement climatique réalisé en 2006.

Johan Rockström (*), de l’Institut de recherche sur l’impact du climat de Potsdam et l’un des auteurs de l’étude, a déclaré : « Le système alimentaire mondial tient l’avenir de l’humanité sur Terre entre ses mains ».

L’étude propose de réorienter les subventions et les incitations fiscales au détriment des grandes monocultures destructrices qui reposent sur les engrais, les pesticides et le défrichement des forêts. Les incitations financières devraient plutôt être orientées vers les petits exploitants qui pourraient transformer leurs fermes en puits de carbone et laisser plus d’espace à la faune et à la flore.

Un changement de régime alimentaire est un autre élément clé, de même que l’investissement dans des technologies permettant d’améliorer l’efficacité et de réduire les émissions.

Selon le rapport, la diminution de l’insécurité alimentaire permettrait d’éradiquer la sous-nutrition d’ici à 2050, de réduire de 174 millions le nombre de décès prématurés et de permettre à 400 millions de travailleurs agricoles de gagner un revenu suffisant. La transition proposée permettrait de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels et de réduire de moitié les écoulements d’azote provenant de l’agriculture.

Dans l’ensemble, ils estiment que les coûts de la transformation se situe entre 0,2 % et 0,4 % du PIB mondial par an.

Lors de leurs premières recherches, Rockström et ses collègues ont constaté que l’alimentation était le plus grand secteur de l’économie à enfreindre les limites planétaires. Outre son impact sur le climat, l’alimentation est l’un des principaux moteurs du changement d’affectation des sols et du déclin de la biodiversité, et elle est responsable de 70 % de l’épuisement des ressources en eau douce.

Le rapport a été rédigé par la Commission sur l’économie du système alimentaire, formée par l’Institut de Potsdam, la Coalition pour l’alimentation et l’utilisation des terres et l’EAT, une coalition holistique du système alimentaire composée du Centre de résilience de Stockholm, du Wellcome Trust et de la Fondation Strawberry. Les partenaires universitaires comprennent l’Université d’Oxford et la London School of Economics.

Elle a estimé les coûts cachés de l’alimentation, notamment le changement climatique, la santé humaine, la nutrition et les ressources naturelles, à 15 000 milliards de dollars, et a créé un nouveau modèle pour prévoir l’évolution de ces coûts cachés dans le temps, en fonction de la capacité de l’humanité à changer. Leurs calculs sont conformes à un rapport publié l’année dernière par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, qui estimait les coûts agroalimentaires non comptabilisés à plus de 10 000 milliards de dollars à l’échelle mondiale en 2020.

Steven Lord, de l’Institut du changement environnemental de l’Université d’Oxford, a déclaré dans un communiqué : « Cette analyse chiffre pour la première fois l’opportunité économique régionale et mondiale que représente la transformation des systèmes alimentaires. Même si elle n’est pas facile, cette transformation est abordable à l’échelle mondiale et les coûts qui s’accumuleront à l’avenir si l’on ne fait rien représentent un risque économique considérable ».


De nombreuses autres études ont démontré les avantages pour la santé et le climat d’un passage à une alimentation à base de végétaux. Un rapport publié l’année dernière par l’Observatoire du climat note que l’industrie brésilienne du bœuf – et la déforestation qui en découle – a aujourd’hui une empreinte carbone plus importante que l’ensemble des voitures, usines, climatiseurs, gadgets électriques et autres sources d’émissions au Japon.

La nouvelle étude n’est pas prescriptive en ce qui concerne le végétarisme, mais M. Rockström a déclaré que la demande de bœuf et de la plupart des autres viandes diminuerait si les coûts cachés liés à la santé et à l’environnement étaient inclus dans le prix.

Nicholas Stern, président de l’Institut de recherche Grantham sur le changement climatique et l’environnement de la London School of Economics, s’est félicité de cette étude : « L’économie du système alimentaire actuel est malheureusement un échec irrémédiable. Ses « coûts cachés » nuisent à notre santé et dégradent notre planète, tout en aggravant les inégalités mondiales. Il sera essentiel de modifier nos modes de production et de consommation alimentaires pour lutter contre le changement climatique, protéger la biodiversité et construire un avenir meilleur. Il est temps d’opérer un changement radical. »

Le principal défi de la transition alimentaire proposée est l’augmentation du coût des denrées alimentaires. Selon M. Rockström, il faudra faire preuve de dextérité politique et soutenir les couches défavorisées de la société, faute de quoi des manifestations pourraient avoir lieu, à l’instar de celles des gilets jaunes qui se sont déroulées en France à la suite de l’augmentation du prix de l’essence.

Christiana Figueres, ancienne secrétaire exécutive de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, a souligné le caractère prospectif du rapport : « Cette recherche prouve qu’une réalité différente est possible et nous montre ce qu’il faudrait faire pour que le système alimentaire devienne un puits de carbone net d’ici à 2040. Cette opportunité devrait attirer l’attention de tout responsable politique désireux d’assurer un avenir plus sain à la planète et à ses habitants ».