Pour le démantèlement immédiat du complexe fossile

Carte blanche parue dans Le Soir

Par Paul Blume, Observatoire de l’Anthropocène; Cédric Chevalier, essayiste, Observatoire de l’Anthropocène; Kim Le Quang, Rise for Climate Belgium; Laurent Lievens, docteur en sociologie et chargé de cours, Observatoire de l’Anthropocène


Le philosophe Frédéric Lordon, grand disciple du philosophe Baruch Spinoza, a poursuivi sa réflexion sur les affects qui règlent les relations humaines, la société, la politique et le fonctionnement de l’Etat. En politique, chacun, chaque camp, chaque parti, cherche à affecter le reste du corps politique afin de le mobiliser, de le mettre en mouvement, dans une direction souhaitée, préférée. Les mots prononcés par les « leaders d’opinion », politiciens, les intellectuels, les activistes, les citoyens, les artistes, dans leurs discours, débats, œuvres d’art nous affectent plus ou moins intensément et nous mettent en mouvement. Les idées, en ce sens, gouvernent le monde, si elles sont capables d’affecter les corps, les puissances d’agir individuelles, dont le corps politique, la puissance de la multitude ou puissance publique, est l’émergence et se traduit dans l’institution de l’Etat mais aussi dans toute organisation composée de membres. Depuis plusieurs décennies, l’écologie scientifique, philosophique et politique a cherché à affecter le corps politique dans son champ d’intervention. Les scientifiques ont usé du langage de la science, prudent, modéré, circonspect, conservateur tandis que les philosophes usaient du langage de la philosophie, rigoureux, aride, conceptuel, tandis que les politiciens usaient du langage de la politique, ambigu, consensuel, cherchant à diviser ou rassembler, cherchant à dévoiler ou à cacher, tandis que les activistes et les artistes usaient du langage de l’activisme et de l’art, cherchant à choquer, à secouer, à bousculer pour provoquer un réveil, une conscience de l’urgence et une mobilisation citoyenne et politique à la hauteur de cette urgence. Ces discours se renforcent ou se déforcent mutuellement, s’affrontent, se composent et se décomposent. C’est ce qui fait l’histoire. Lentement, des lignes bougent, y compris dans les rédactions journalistiques. Mais la réaction, toujours en embuscade, cherche à contrecarrer ce mouvement naissant, cherche à conserver l’inertie du corps politique orientée dans une trajectoire insoutenable. Une lutte de visions du monde, de mots, de partis, de mouvements, est à l’œuvre et va déterminer le sort de millions, de milliards de vies, le détermine déjà. Certains accusent d’autres d’illusion et vice versa. Mais le monde ne connaîtra qu’une seule trajectoire. Sera-t-elle celle de l’effondrement ou celle de la métamorphose ?

Parmi les mots qu’il importe d’introduire dans le débat public, figure ceux de démantèlement immédiat du complexe fossile. Les mots sont forts : démantèlement, immédiat, complexe, fossile.

Qu’est-ce le complexe fossile ? Au sens large, c’est l’économie mondiale, dont le fonctionnement repose encore massivement sur les combustibles fossiles qui nous tuent littéralement, par la pollution de l’air, la catastrophe climatique, la destruction des écosystèmes, l’extractivisme, le consumérisme, et bien d’autres maux. Font partie du complexe fossile : le complexe automobile, le complexe agro-alimentaire, le complexe aérien (tourisme et marchandise), le complexe de la construction (immobilier et routier), le complexe naval (tourisme et marchandise), le complexe plastique, le complexe énergétique et bien sûr, le complexe pétrochimique lui-même, qui les fournit tous en combustibles fossiles. Au sens plus étroit, c’est l’industrie pétrochimique.

Pourquoi le mot complexe ? Il signifie « tissé ensemble » et décrit une manière de penser systémique, non mutilée, où on refuse d’analyser seulement certains morceaux de la réalité, en oubliant d’autres. Ainsi, il n’est pas adéquat de s’attaquer à l’industrie pétrochimique sans s’attaquer à notre usage collectif des combustibles fossiles puisque nous faisons partie du même système. Notre société, l’économie mondialisée est intimement tissée avec le complexe fossile. Impossible de conserver notre société sans les combustibles fossiles, nous n’avons le choix que de changer de société ou détruire l’habitabilité planétaire. Les scientifiques sont clairs : nous devons sortir de toute urgence du fossile.

Que signifie démantèlement ? Cela signifie qu’il faut non seulement refuser tout nouvel inverstissement dans l’infrastructure fossile (cela comprend les routes, les usines de moteurs thermiques, les terminaux gaziers, les centrales au gaz, et les pipelines mais aussi les usines de fabrication de plastiques et les élevages et productions céréalières dépendantes du pétrole et de ses dérivés), mais qu’il faut également fermer et déconstruire l’infrastructure fossile existante, puisqu’elle continue à consommer des combustibles fossiles et donc à émettre de mortels gaz à effet de serre. Une simple analogie : il ne s’agit pas d’ajouter une pompe à chaleur à côté de la chaudière au mazout en priant pour que ça marche, il faut déconnecter, retirer et démanteler la chaudière au mazout (dont les matières et pièces peuvent servir à fabriquer de nouvelles pompes à chaleur). Le démantèlement ne peut être instantané, il faudra des milliards d’heures de travail dans le monde pour démanteler l’infrastructure fossile et construire l’infrastructure économique soutenable. C’est un processus gigantesque qui ne peut pas prendre moins que plusieurs décennies. Jusqu’à présent, nous avons surtout ajouté des éléments soutenables sans retirer les éléments insoutenables. Il ne faut donc pas s’étonner que la situation climatique et écologique empire. Comme s’étonner qu’un alcoolique qui boit un peu d’eau en plus de son whiskey verrait sa santé continuer à se détériorer.

Que signifie immédiat ? Cela signifie que le démantèlement doit commencer aujourd’hui, immédiatement, bien qu’il s’agisse d’un processus de longue haleine, et qu’il doit se dérouler le plus rapidement possible, ce qui nécessite une mobilisation générale des citoyens et le passage des gouvernements et administrations en mode urgence, en mode « économie de guerre ». Chaque jour d’émissions de gaz à effet de serre se traduit par des morts supplémentaires. Tout retard est éthiquement injustifiable. Nous n’avons le choix que de démanteler le complexe fossile dès maintenant, sans attendre, pour minimiser le nombre total de victimes présentes et futures. Cela signifie concrètement que non seulement, on doit mettre fin aux chantiers de construction de nouvelle infrastructure fossile comme les centrales au gaz mais qu’on doit également démanteler une partie de l’industrie pétrochimique anversoise, une bonne partie des aéroports de Zaventem, Liège et Charleroi, ainsi qu’une bonne partie de notre industrie fossile, tout en reconvertissant les sites industriels, les bâtiments, les équipements, les machines, et les travailleurs à des activités économiques, des industries et des emplois soutenables, en suivant une logique de transition juste, où personne n’est laissé de côté. Tant que nous ne voyons aucun démantèlement en cours, nous ne sommes pas en transition et continuons à détruire l’habitabilité planétaire. Nous devons apprendre à retirer et pas seulement à ajouter.

En conclusion, voici 6 revendications à retenir pour un démantèlement immédiat du complexe fossile et la transition juste vers l’économie soutenable :

  1. Pas de nouveaux combustibles fossiles : pas de nouveaux financements publics ou privés, pas de nouveaux accords, licences, permis ou extensions. La mise à disposition d’un financement climatique suffisant et consensuel pour concrétiser cet engagement partout.
  2. Une élimination rapide, juste et équitable des infrastructures existantes, conformément à la résolution de plafonnement de température à 1,5 °C, et un plan mondial, notamment un traité de non-prolifération des combustibles fossiles, pour garantir que chaque pays prenne sa part de responsabilité.
  3. De nouveaux engagements de coopération internationale afin d’de déployer les soutiens financiers, sociaux et technologiques pour assurer l’accès aux énergies renouvelables, les plans de diversification économique, les plans de transition socialement juste, de sorte que chaque pays et chaque communauté puisse se passer rapidement des combustibles fossiles.
  4. Mettre fin à l’écoblanchiment et reconnaître que les compensations, la technologie de captage et de stockage du dioxyde de carbone (CSC) ou la géo-ingénierie sont des illusions.
  5. Tenir les pollueurs responsables de leurs dégâts et veiller à ce que les industries du charbon, du pétrole et du gaz paient des réparations pour les pertes et les préjudices causés au climat et aux populations, ainsi que pour la réhabilitation, l’assainissement et la transition au niveau local.
  6. Mettre fin au lobby réactionnaire des entreprises utilisant les combustibles fossiles : non aux entreprises qui rédigent les dispositions de l’action climatique, qui financent les négociations sur le climat ou qui compromettent la réponse mondiale apportée face au changement climatique.


‘Personne ne veut avoir raison sur ce sujet’

les scientifiques du climat sont horrifiés et exaspérés par les prévisions mondiales.

Par 7 experts du Climat

Source : The Guardian – Traduction Deepl

Alors que l’hémisphère nord brûle, les experts ressentent une profonde tristesse – et du ressentiment – en redoutant ce qui attend l’été australien.

Le Guardian Australia a demandé à sept éminents climatologues de décrire ce qu’ils ressentent alors qu’une grande partie de l’hémisphère nord est engloutie par des vagues de chaleur torrides et qu’un certain nombre de records climatiques terrestres et océaniques mondiaux sont battus.


Je suis stupéfaite par la férocité de la situation

Ce qui se passe actuellement dans le monde entier est tout à fait conforme aux prévisions des scientifiques. Personne ne veut avoir raison. Mais pour être honnête, je suis stupéfait par la férocité des impacts que nous subissons actuellement. Je redoute vraiment la dévastation que cet El Niño va entraîner. Alors que la situation se détériore, je me demande comment je peux être le plus utile dans un moment comme celui-ci. Dois-je continuer à essayer de poursuivre ma carrière de chercheur ou consacrer encore plus de temps à avertir le public ? La pression et l’anxiété liées à la gestion d’une crise de plus en plus grave pèsent lourdement sur nombre d’entre nous.

Joëlle Gergis, maître de conférences en sciences du climat à la Fenner School of Environment and Society, chercheur associé à l’ARC Centre of Excellence for Climate Extremes de l’Australian National University.


Même un réchauffement de 1,2 °C n’est pas sûr

Dès le milieu des années 1990, nous savions que des monstres se cachaient sous les projections de nos modèles climatiques : des vagues de chaleur monstrueuses, des précipitations et des inondations extrêmes catastrophiques, des incendies de forêt à l’échelle subcontinentale, un effondrement rapide de la calotte glaciaire faisant monter le niveau de la mer de plusieurs mètres en l’espace d’un siècle. Nous savions – tout comme nous connaissons la gravité – que la Grande Barrière de Corail d’Australie pourrait être l’une des premières victimes d’un réchauffement planétaire incontrôlé.

Mais alors que des vagues de chaleur monstrueuses et mortelles s’abattent aujourd’hui sur de grandes parties de l’Asie, de l’Europe et de l’Amérique du Nord, avec des températures que nous n’avons jamais connues, nous constatons que même un réchauffement de 1,2 °C n’est pas sans danger.

L’industrie des combustibles fossiles est à l’origine de tout cela. Les dirigeants politiques, qui refusent de contrôler cette industrie et qui encouragent des politiques telles que la compensation et l’expansion massive du gaz, lui permettent tout simplement de continuer à exister.

Bill Hare, physicien et climatologue, directeur général de Climate Analytics.


Quel autre choix avons-nous ?

Voilà à quoi ressemble le changement climatique aujourd’hui. Et voilà à quoi ressemblera le changement climatique à l’avenir, même s’il continuera probablement à s’aggraver.

Je ne sais pas de combien d’avertissements supplémentaires le monde a besoin. C’est comme si l’humanité avait reçu un diagnostic médical en phase terminale, qu’elle savait qu’il existait un remède, mais qu’elle avait consciemment décidé de ne pas se sauver.

Mais ceux d’entre nous qui comprennent et qui se sentent concernés doivent continuer à essayer – après tout, quel autre choix avons-nous ?

Lesley Hughes, membre du conseil d’administration de la Climate Change Authority et professeur émérite à l’université Macquarie.


L’histoire les jugera très sévèrement

Je me souviens encore de la lecture du rapport de la conférence de Villach de 1985, qui alertait la communauté scientifique sur le lien possible entre la production de gaz à effet de serre et le changement climatique. En 1988, j’ai dirigé la Commission australienne pour l’avenir et j’ai travaillé avec Graeme Pearman, du CSIRO, sur Greenhouse ’88, un programme visant à attirer l’attention du public sur les résultats scientifiques.

Aujourd’hui, tous les changements prévus sont en train de se produire, et je réfléchis donc à l’ampleur des dommages environnementaux et des souffrances humaines inutiles qui résulteront du travail des hommes politiques, des chefs d’entreprise et des personnalités publiques qui ont empêché toute action concertée. L’histoire les jugera très sévèrement.

Ian Lowe, professeur émérite à l’école des sciences de l’université Griffith


Seul le temps nous le dira

Même si nous disons depuis des décennies que c’est ce à quoi il faut s’attendre, il est toujours très inquiétant de voir ces extrêmes climatiques se manifester avec une telle férocité et une telle portée mondiale. Cet été, ce sera le tour de l’Australie, cela ne fait aucun doute.

La lenteur de l’action politique me frustre profondément – il est déconcertant de voir que de nouveaux projets d’extraction de combustibles fossiles obtiennent toujours le feu vert ici en Australie. Cette frustration s’accompagne d’un profond ressentiment à l’égard de ceux qui ont fait pression en faveur de la poursuite de l’utilisation des combustibles fossiles en dépit de la physique climatique clairement connue depuis près d’un demi-siècle.

Ces dernières semaines, je me suis demandé si cette année allait enfin être celle où tous les doutes concernant la crise du changement climatique seraient balayés par une série d’extrêmes climatiques coûteux. Cela pourrait être l’un des avantages d’une année 2023 aussi exceptionnelle. Seul l’avenir nous le dira.

Matthew England, professeur de science, Australian Centre for Excellence in Antarctic Science (ACEAS), Université de Nouvelle-Galles du Sud.


Ce que nous vivons aujourd’hui n’est qu’un début

J’ai passé les quatre dernières semaines dans un institut de recherche allemand, en pleine canicule. Je me suis rendue à Berlin, ma ville natale, le week-end pour voir mon père âgé et malade, en essayant de le rafraîchir dans son appartement en ville et de le convaincre que boire de l’eau pouvait être une bonne idée (pas toujours avec succès). Je me suis également vanté auprès de mes collègues et amis qui se plaignaient de la chaleur : « Ce n’est rien, essayez de vivre une vague de chaleur en Australie ! L’Australie est un pays idéal pour se vanter. Il y a toujours des exemples plus grands, plus extrêmes et plus venimeux sous nos latitudes.

Ai-je été surpris par cette canicule ? Bien sûr que non. J’ai plutôt ressenti une légère curiosité scientifique à voir se concrétiser ce que nous prévoyons depuis des années. J’ai également ressenti de la tristesse. Nous savons que ce que nous vivons actuellement n’est que le début de conditions bien pires à venir. Quelles seront les conséquences pour nos écosystèmes, la disponibilité de l’eau, la santé humaine, les infrastructures et les chaînes d’approvisionnement ? Nous connaissons la réponse. Mais je vois aussi des signes de changement. Plus d’une fois, j’ai failli être renversé par un vélo ; je n’étais pas habitué aux pistes cyclables très fréquentées en Allemagne. J’ai également passé de nombreuses heures dans des trains et j’ai constaté un réel changement dans le paysage qui défilait. J’ai traversé de grands parcs solaires et éoliens et j’ai écouté les conversations des autres voyageurs, qui tournaient le plus souvent autour du changement climatique. Au cours de l’une d’entre elles, quelqu’un a mentionné que tous ces pays ensoleillés, comme l’Australie, sont probablement alimentés à 100 % par des énergies renouvelables à l’heure actuelle. J’ai souri en silence ; il y a encore des choses dont nous ne pouvons pas (encore) nous vanter en Australie.

Katrin Meissner, directrice du centre de recherche sur le changement climatique de l’université de Nouvelle-Galles du Sud


Cela devrait nous préoccuper

Il est affligeant de constater l’ampleur des dégâts causés par la vague actuelle d’événements extrêmes dans de nombreuses régions du globe. Malheureusement, il ne s’agit pas d’un phénomène isolé, mais d’une tendance à long terme alimentée par les émissions de gaz à effet de serre de l’homme. Ils ne sont donc pas inattendus.

Fait inquiétant, il est clair que les événements extrêmes à venir battront à nouveau des records et causeront des dégâts encore plus importants. Cela s’explique notamment par le fait que, dans de nombreux cas, les dommages ne sont pas linéaires : ils augmentent de plus en plus rapidement à chaque fois que le changement climatique s’accentue. Cela devrait nous préoccuper. Nous devrions rationnellement prendre du recul et évaluer ce qui est dans notre intérêt économique, social et environnemental. Le GIEC l’a fait et l’évaluation est claire : il est dans notre intérêt de réduire les émissions de gaz à effet de serre rapidement, substantiellement et durablement.

Il est également dans notre intérêt de mettre en place de vastes programmes intégrés d’adaptation au climat pour faire face aux effets du changement climatique que nous ne pourrons pas éviter. Prendre des mesures pour réduire les émissions et s’adapter au changement climatique nous donnera de l’espoir. Voulons-nous vraiment l’alternative ?

Professeur Mark Howden, directeur de l’Institut pour les solutions en matière de climat, d’énergie et de catastrophes à l’Université nationale australienne.



Nous sommes des imbéciles

le scientifique qui a tiré la sonnette d’alarme sur le climat dans les années 80 annonce le pire pour l’avenir.

Oliver Milman

Source : The Guardian – Traduction Deepl – Cri

James Hansen, qui a témoigné devant le Congrès sur le réchauffement de la planète en 1988, affirme que le monde s’approche d’une « nouvelle limite climatique ».

Selon James Hansen, le scientifique américain qui a alerté le monde sur l’effet de serre dans les années 1980, le monde s’achemine vers un climat surchauffé sans précédent depuis un million d’années, c’est-à-dire avant l’existence de l’homme, parce que « nous sommes de sacrés imbéciles » pour n’avoir pas réagi aux avertissements concernant la crise climatique.

M. Hansen, dont le témoignage devant le Sénat américain en 1988 est considéré comme la première révélation importante du réchauffement planétaire, a averti dans une déclaration avec deux autres scientifiques que le monde se dirigeait vers une « nouvelle limite climatique » avec des températures plus élevées que jamais au cours du dernier million d’années, entraînant des conséquences telles que des tempêtes plus fortes, des vagues de chaleur et des sécheresses.

La planète s’est déjà réchauffée d’environ 1,2°C depuis l’industrialisation de masse, ce qui fait que le risque d’avoir des températures estivales extrêmes comme celles que l’on observe actuellement dans de nombreuses régions de l’hémisphère nord est de 20 %, alors qu’il n’était que de 1 % il y a 50 ans, a déclaré M. Hansen.

« Il y a beaucoup plus à venir, à moins que nous ne réduisions les quantités de gaz à effet de serre », a déclaré M. Hansen, âgé de 82 ans, au Guardian. « Ces super-tempêtes sont un avant-goût des tempêtes que connaîtront mes petits-enfants. Nous nous dirigeons sciemment vers cette nouvelle réalité – nous savions qu’elle allait arriver ».

Hansen était un climatologue de la Nasa lorsqu’il a mis en garde les législateurs contre l’augmentation du réchauffement de la planète. Depuis, il a participé à des manifestations aux côtés d’activistes pour dénoncer l’absence de mesures visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre au cours des décennies qui ont suivi.

Il a déclaré que les vagues de chaleur record qui ont frappé les États-Unis, l’Europe, la Chine et d’autres pays ces dernières semaines ont renforcé « le sentiment de déception que nous, scientifiques, n’ayons pas communiqué plus clairement et que nous n’ayons pas élu des dirigeants capables d’une réponse plus intelligente ».

« Cela signifie que nous sommes de sacrés imbéciles », a déclaré M. Hansen à propos de la lenteur de la réponse de l’humanité à la crise climatique. « Nous devons y goûter pour y croire ».

Cette année devrait être la plus chaude jamais enregistrée au niveau mondial, l’été étant déjà marqué par le mois de juin le plus chaud et, peut-être, la semaine la plus chaude jamais mesurée de manière fiable. À l’inverse, l’année 2023 pourrait être considérée comme une année moyenne, voire douce, alors que les températures continuent de grimper. « Les choses vont empirer avant de s’améliorer », a déclaré M. Hansen.

« Cela ne signifie pas que la chaleur extrême observée cette année à un endroit donné se reproduira et s’amplifiera chaque année. Les fluctuations météorologiques font bouger les choses. Mais la température moyenne mondiale va augmenter et les dés climatiques seront de plus en plus chargés, avec notamment davantage d’événements extrêmes. »

Dans un nouveau document de recherche, qui n’a pas encore fait l’objet d’un examen par les pairs, M. Hansen a affirmé que le réchauffement de la planète s’accélère, même si l’on tient compte des variations naturelles, telles que l’épisode climatique El Niño qui fait périodiquement monter les températures. Cette accélération est due à un déséquilibre « sans précédent » entre la quantité d’énergie solaire entrant dans la planète et l’énergie réfléchie par la Terre.

S’il ne fait aucun doute que les températures mondiales augmentent en raison de l’utilisation de combustibles fossiles, les scientifiques sont divisés sur la question de savoir si ce rythme s’accélère. « Nous ne voyons aucune preuve de ce que Jim affirme », a déclaré Michael Mann, climatologue à l’université de Pennsylvanie, qui a ajouté que le réchauffement du système climatique avait été « remarquablement stable ». D’autres ont déclaré que l’idée était plausible, bien qu’il faille davantage de données pour en être certain.

« Il est peut-être prématuré de dire que le réchauffement s’accélère, mais il est certain qu’il ne diminue pas. Nous avons encore le pied sur l’accélérateur », a déclaré Matthew Huber, expert en paléoclimatologie à l’université de Purdue.

Les scientifiques ont estimé, grâce à des reconstructions basées sur des preuves recueillies dans des carottes de glace, des cernes d’arbres et des dépôts de sédiments, que la poussée actuelle du réchauffement a déjà porté les températures mondiales à des niveaux jamais atteints sur Terre depuis environ 125 000 ans, avant la dernière période glaciaire.

« Il est fort possible que nous vivions déjà dans un climat qu’aucun être humain n’a connu auparavant et nous vivons certainement dans un climat qu’aucun être humain n’a connu avant la naissance de l’agriculture », a déclaré Bob Kopp, climatologue à l’université Rutgers.

Si les températures mondiales augmentent encore de 1°C ou plus, ce qui devrait se produire d’ici la fin du siècle à moins d’une réduction drastique des émissions, M. Huber a déclaré que M. Hansen avait « largement raison » de dire que le monde serait plongé dans une chaleur telle qu’il n’en a pas connu depuis 1 à 3 millions d’années, une période appelée Pliocène.

« Il s’agit d’un monde radicalement différent », a déclaré M. Huber à propos d’une époque où il faisait suffisamment chaud pour que des hêtres poussent près du pôle sud et où le niveau de la mer était environ 20 mètres plus élevé qu’aujourd’hui, ce qui noierait aujourd’hui la plupart des villes côtières.

Vidéo – voir article original

« Nous poussons les températures vers les niveaux du Pliocène, ce qui est en dehors du domaine de l’expérience humaine ; c’est un changement tellement massif que la plupart des choses sur Terre n’ont pas eu à y faire face », a déclaré M. Huber. « Il s’agit essentiellement d’une expérience sur les humains et les écosystèmes pour voir comment ils réagissent. Rien n’est adapté à cette situation.

Les précédents changements climatiques, provoqués par les gaz à effet de serre ou les modifications de l’orbite terrestre, se sont déroulés sur des milliers d’années. Mais alors que les vagues de chaleur frappent des populations habituées à des températures extrêmes, que les forêts brûlent et que la vie marine s’efforce de faire face à la montée en flèche de la chaleur des océans, la hausse actuelle se produit à un rythme jamais vu depuis l’extinction des dinosaures, il y a 65 millions d’années.

« Ce n’est pas seulement l’ampleur du changement, c’est aussi son rythme qui pose problème », a déclaré Ellen Thomas, une scientifique de l’université de Yale qui étudie le climat à l’échelle des temps géologiques. « Nous avons des autoroutes et des voies ferrées qui sont en place, notre infrastructure ne peut pas bouger. Presque tous mes collègues ont dit qu’avec le recul, nous avons sous-estimé les conséquences. Les choses évoluent plus vite que nous ne le pensions, ce qui n’est pas bon ».

Selon M. Huber, la chaleur torride de cet été a révélé au monde entier un message que M. Hansen a tenté de transmettre il y a 35 ans et que les scientifiques se sont efforcés de faire passer depuis. « Cela fait des décennies que les scientifiques nous regardent en face, mais aujourd’hui, le monde entier passe par le même processus, qui ressemble aux cinq étapes du deuil », a-t-il déclaré. « Il est douloureux de voir les gens traverser cette épreuve.

« Mais nous ne pouvons pas nous contenter d’abandonner parce que la situation est désastreuse », a ajouté M. Huber. Nous devons dire « Voici où nous devons investir, apporter des changements et innover » et ne pas baisser les bras. Nous ne pouvons pas faire une croix sur des milliards de personnes.



Et si nous étions à l’automne 1939, goguenards ?

Bruno Colmant

reprise, avec l’accord de l’auteur, d’un post LinkEdIn

Si l’été est le moment du recul et de la réflexion, je suis, en vérité, pétrifié. Nous sommes face à des défis environnementaux existentiels, dont les conséquences sociales, économiques, migratoires et militaires sont d’une envergure qui nous dépasse. Cette réalité se conjugue à une anxiété sociale, qui reflète la dualisation croissante de la société. Car, ne l’oublions pas, bon pays, mauvais pays développé, la part de la population qui est sous le seuil de pauvreté dépasse 25 %. Et c’est honteusement un problème de riches, puisque 10 % de la population mondiale vit dans l’extrême pauvreté.

Tous, nous constatons que la réflexion longue a cédé le pas à la réaction immédiate, puisque le ressenti instantané prime sur la somme des savoirs. Alors, nous cherchons tous des apaisements éphémères, des images, des « likes », des étourdissements, des vertiges frivoles, des postures, bref, des futilités.

Après tout, ces scientifiques et autres moralisateurs ont peut-être raison, mais si l’avenir est aussi sombre, autant vivre et consommer intensément.

Et puis, ces intellectuels accablés sont fatigants, non ?

Mais faisons attention.

Très attention.

Pendant que nous nous réjouissons, certains façonnent notre futur.

Et ils le maquillent.

Je ne parle pas des dingues de la Silicon Valley qui veulent créer une humanité 2.0 tout en sécurisant des abris antiatomiques en Nouvelle-Zélande.

Je parle de ceux qui nous dirigent.

Et nous sommes peut-être à l’automne 1939, lors de la drôle de guerre. La mobilisation avait été décidée. Les paysans et les instituteurs, tous goguenards, attendaient leur retour aux champs et écoles.

Mais de sourdes forces furieuses s’animaient lentement, sans qu’on veuille les voir.

Alors, voilà, nous sommes peut-être en 1939. Et moi, je dis : l’Europe, la Belgique votent l’an prochain.

Et il est peut-être temps de s’impliquer.

Pas par procuration.

En action.

Stéphane Hessel avait écrit : « indignez-vous ».

Et comme un de mes amis journalistes me disait ce matin : « indignez-vous et impliquez-vous ».

références Bruno Colmant



Les Francs-Maçons belges en appellent à la prise de mesures fortes et rapides pour le climat et la biodiversité !

Une opinion d’Alain Cornet, Grand-Maître du Grand Orient de Belgique, Daniel Menschaert, Grand-Maître de Fédération belge de l’ordre maçonnique mixte international du Droit-Humain, Léon Gengoux, Grand Maître de la Grande Loge de Belgique, Raymonda Verdyck, Grande-Maîtresse de la Grande Loge Féminine de Belgique et Jan Vanherck, Président de la Confédération de Loges Lithos

Contribution externe parue dans la Libre du 15 juillet 2023

Le mercredi 12 juillet, le Parlement européen a adopté un texte de “Règlement de restauration de la nature” visant à préserver un minimum d’environnement naturel existant et à en restaurer d’autres. La préservation de ces espaces naturels est indispensable pour lutter efficacement contre le réchauffement climatique et donc pour garantir la survie de l’humanité. Nous pourrions nous en réjouir mais il est inquiétant de constater que la portée du texte, adopté par l’Assemblée, a été fortement affaiblie par de nombreux amendements lesquels affectent tant son efficacité que sa mise en œuvre.

La Franc-maçonnerie n’a pas pour objet, ni pour but d’exprimer une opinion collective, mais, lorsque le respect des valeurs humaines est en péril, lorsqu’une vie digne pour tous les humains risque de ne plus être assurée, lorsque la qualité de vie des générations futures est profondément obérée, le silence n’est plus de mise.

Agir ici et maintenant

Les Francs-Maçons travaillent à la réalisation d’un développement moral, intellectuel et spirituel le meilleur pour tous. Ils sont conscients que cela n’est possible que dans le cadre d’une humanité fraternellement organisée entre les êtres humains d’une part et entre ceux-ci et la nature dans son ensemble d’autre part. Agir ici et maintenant pour atteindre cet objectif est essentiel pour la vie future sur notre planète.

Dès lors, nous estimons qu’il est de notre devoir de nous adresser à tous ceux qui ont des décisions à prendre en la matière, aux niveaux des États et de l’Europe, afin qu’ils agissent sans délai et prennent les mesures indispensables pour assurer aux générations futures une vie décente et cela sans aucune distinction et quel que soit le lieu où celles-ci vivront.

Notre conscience d’êtres humains est heurtée

Notre conscience d’êtres humains est heurtée par toute tergiversation quant à la mise en œuvre de politiques de sauvegarde de la nature qui pourrait mettre en cause la survie de l’humanité. C’est pourquoi, à la suite du débat qui a eu lieu au Parlement européen, nous joignons notre voix à celles de tous ceux qui pensent que les enfants d’aujourd’hui et de demain sont notre véritable priorité. Ensemble, avec les citoyens du futur nous faisons partie de ce que le philosophe François Ost appelle une communauté temporelle. Nous estimons également que nous sommes tout aussi responsables à l’égard des autres espèces naturelles. Pas uniquement que notre propre survie en dépend. La science nous rappelle que nous partageons avec toute la matière de l’univers une histoire commune. Tout ce qui vit participe au mécanisme de régulation des écosystèmes.

Relever un défi existentiel pour l’humanité

Le monde scientifique s’accorde également pour affirmer qu’il faut prendre d’urgence des mesures drastiques pour enrayer le réchauffement climatique et aussi la destruction de la biodiversité. Seul un équilibre harmonieux entre l’Homme et son environnement pourra assurer la survie de l’humanité.

Nous restons persuadés qu’une large majorité des députés européens et de membres des gouvernements nationaux sont conscients que ces mesures sont indispensables, sauf à condamner des pans entiers de la société à tenter de survivre dans des environnements dévastés.

Le monde traverse de nombreuses crises – dont certaines sont précisément induites par la crise climatique – mais elles ne peuvent pas être un obstacle aux actions à mener pour relever le défi existentiel que l’humanité s’est lancée à elle-même.

Le Progrès ne doit plus être responsable d’une perte de sensibilité

Nous sommes conscients que les décisions sont difficiles à prendre, elles remettent inévitablement en question nos modes de vie, nos modes de production et de consommation, voire, des éléments importants de notre système économique. Les citoyens ne l’accepteront que s’ils constatent que leurs représentants leur proposent en même temps une alternative globale et positive, un projet de société reposant sur des principes de fraternité et d’égalité, où la nature serait considérée autrement que comme une ressource inépuisable. Une société où la définition du Progrès ne serait plus responsable d’une perte de sensibilité à l’égard des autres formes de vie car la crise écologique est également une crise de la sensibilité et une crise du sens des responsabilités individuelles et collectives. D’ailleurs, un tel projet de société pourrait être largement débattu dans la société elle-même, les citoyens devenant ainsi coresponsables des décisions à prendre. La démocratie n’en sortira que renforcée et grandie.




Faites entendre votre voix

Un projet des Territoires de la mémoire

vers juin2024.eu / juin2024 le Blog

Chaque élection rencontre le risque d’une émergence de partis d’extrême-droite, ce phénomène a pu s’observer ces dernières années à travers toute l’Europe… et la Belgique n’est pas épargnée. Mais au-delà de cette menace directe, chaque échéance électorale se confronte à la propagation de discours populistes, d’idées mettant à mal nos démocraties, et ce jusqu’au cœur de partis dits « classiques ».

Et puis il y a les citoyen·ne·s, parfois enthousiastes ou engagé·e·s, mais souvent désillusionné·e·s d’une représentation politique dans laquelle ils et elles ne se reconnaissent pas, d’un système qui laisse un sentiment d’impuissance.
C’est dans ce contexte que les Territoires de la Mémoire relanceront la campagne de sensibilisation Triangle Rouge, et au cœur de celle-ci, le projet Porte-Voix !

Porte-Voix ! , c’est l’envie de se faire entendre, de collecter la parole des citoyennes et des citoyens tout au long de l’année 2023 et de convertir ces paroles, nos revendications, nos exigences en quelque chose de beau.

Concrètement, les Territoires de la Mémoire souhaitent rassembler autour de ce projet une diversité de partenaires qui participeront à collecter les voix citoyennes et de les « esthétiser » par le biais d’ateliers artistiques afin qu’elles trouvent leur place dans une exposition collective qui verra le jour à l’aube des élections de 2024.

Enfin, nous souhaitons que ces voix soient réellement considérées, c’est pour cela que le projet devra s’achever sur une « phase d’influence « . En effet, nous souhaitons investir pleinement notre rôle de porte-voix en amplifiant les paroles qui nous seront confiées afin de les porter aux oreilles de nos représentant·e·s politiques et de faire vivre ces exigences citoyennes pendant et après cette période électorale.

Si vous aussi vous souhaitez participer avec vos publics à ce projet, n’hésitez pas à nous rejoindre !


Comment ?

Ci-dessous, une ébauche de la méthodologie que nous mettons en place avec nos groupes dans le cadre de ce projet.
Porte-Voix ! est un dispositif qui suscite l’expression et la créativité autour des enjeux de société, et qui s’intègre dans la Campagne Triangle Rouge.

Porte-Voix ! s’articule en 3 étapes :
  • Récolte de la parole, auprès de différents publics à travers des animations, des supports d’expressions variés, des techniques artistiques, autour de la phrase « Pour demain, j’exige… » → de février à décembre 2023
  • Création d’une exposition qui rassemble les productions écrites et créations réalisées → de mars à mai 2024 à la Cité Miroir
  • Construction d’une interpellation politique → de mars à juin 2024
Concrètement !
  • Avec les groupes, la démarche se passe en 2 étapes :

« Je m’informe, je découvre… « , à travers une exposition, une animation, un spectacle, etc. sur différentes thématiques.

« Je m’exprime autour de mes exigences pour demain… « , à travers un atelier d’écriture, un atelier créatif (typographique, collage, slam,…), des photos, des captations sons-vidéos…

  • Avec les individuels : interviews, dispositifs d’expression mobile.
Personne de contact ?

claraderhet@territoires-memoire.be ou 04/250 99 58



Vive la Récession ?

Paul Blume

Durant la législature du Parlement européen qui se termine, de la crise Covid à la guerre en Ukraine, sans oublier la gestion des aspects énergétiques, s’est confirmé un constat aujourd’hui sans appel : il n’y aura pas de découplage entre Produit Intérieur Brut (PIB) et écocide.

Progression du PIB mondial d’un coté, disparition du vivant, pollutions, dégradations de l’ensemble des conditions de vie sur terre en ce compris l’aspect climatique de l’autre, sont intimement liés (réf).

La récession est-elle inévitable ? Est-elle indispensable ?

Si, comme les soubresauts d’une agonisante, l’économie mondiale s’essaie encore aux investissements massifs dans les énergies fossiles, les résultats n’ont rien d’encourageant au regard des conséquences bien réelles et déjà ressenties de cette folle course vers l’effondrement.

Que l’on nomme l’indispensable ralentissement économique décroissance, sobriété ou récession, c’est bien d’une baisse des capacités humaines de destruction dont il est question. L’extrême urgence est dans le renversement de la courbe du PIB, de la courbe de la croissance.

La transition heureuse, elle, semble n’être qu’un mythe. Un récit inévitablement porteur de violences extrêmes.

Rien n’est pire que de promettre la lune. Si nous souhaitons reforger un consensus social minimum, partir de la réalité n’est-il pas incontournable ?

La promesse d’une transition énergétique, elle, s’envole.

Non seulement rien ne vient actuellement corroborer la possibilité d’une substitution globale des énergies fossiles par des alternatives non-émettrices de gaz à effet de serre, mais le doute s’installe de plus en plus quant à la possibilité même de réaliser une quelconque transition énergétique (réf).

Sans oublier que la finalité n’est pas l’économie, mais la Vie.

Garder le taux actuel de recours à quelque forme d’énergie que ce soit implique de continuer de produire, consommer, détruire, polluer… De mener la guerre contre le vivant.

La « bête » humaine devrait fortement et rapidement se replier dans un cadre économique et social compatible avec la perpétuation de l’ensemble des vivants, y compris non-humains. Sous peine d’une réelle disparition.

La question sociale, enjeu crucial.

L’inévitable contraction des activités humaines ne se fera, à l’évidence, pas sans douleur.

Certes, des utopies existent pour guider nos chemins vers des horizons les moins sombres possibles, mais éluder la question des impacts catastrophiques du partage d’un gâteau amoindri année après année serait incompréhensible.

C’est donc à tous les étages du scrutin de juin 2024 que nous devrons être attentifs aux propositions des programmes politiques en matière d’équité sociale.

Le consensus social actuel, né après la deuxième guerre mondiale, se fissure fortement. Ce débat doit être remis en haut des priorités. On ne gère pas les inégalités, la santé collective, l’accès aux ressources vitales de la même façon en temps de disette qu’en temps d’abondance.

Revenus de remplacement, retraites, sécurité sociale risquent de ne pas tenir le choc sans de profonds aménagements.

Écologistes, mutuellistes, syndicalistes, monde associatif et culturel, citoyennes et citoyens, nous avons tous un intérêt vital à exercer des pressions sur la confection des programmes politiques qui seront présentés à nos suffrages en juin 2024.

L’absence d’alternative unique, simple, agréable ne doit pas nous freiner. L’important réside dans la réouverture d’un débat public sur les finalités même de nos sociétés.

C’est de la multiplicité et de la variété des points de vue qui seront échangés que naîtront potentiellement nos nouvelles modalités de gestion des « communs ». Dans l’intérêt du plus grand nombre, en minimisant au maximum les risques vitaux. Sur une base commune la moins inéquitable possible.

Il nous reste un an pour influencer les dernières législatures avant l’année 2030. Cette année qui figure dans tellement de textes, de rapports, comme échéance indicative d’engagements à tenir. Une étape à ne pas rater.



Et si on mettait en pratique la #décroissance ?

Arnaud Diemer

Et si on mettait en pratique la #décroissance ? Que l’on soit pour ou contre la décroissance, il faut admettre que les idées portées par les décroissants questionnent les individus que nous sommes. Dans un paysage économique où le collectif et la coopération ne sont pas de mises, il est utile d’avoir un projet de société qui repose sur des valeurs fortes, qui recentre notre attention sur les humains et non sur les choses. Passé cet enthousiasme, il faut maintenant mettre en pratique la décroissance, proposer des scénarios réalistes en mobilisant toutes les idées qui ont germé dans l’imaginaire collectif (sobriété énergétique, production citoyenne d’énergie, low tech, agroécologie, AMAP, circuits courts, régime alimentaire végétarien, mobilité douce, monnaies locales, baisse du temps de travail, allongement de la durée de vie des produits…).

Pour être opérationnel dans un scénario de décroissance, ces différents leviers doivent être reliés entre eux (analyse systémique), rattachés à un objectif (réduire notre empreinte environnementale tout en garantissant un certain niveau de vie) et illustrés par des grands principes (coopération, réciprocité, proximité, résilience…).

La modélisation (notamment modulaires) peut apporter un regard intéressant sur les forces en mouvement, toutefois le niveau de complexité est tel qu’il faudrait des années pour embrasser une telle dynamique (on atteint ici les limites de la modélisation 🙂 ). Dès lors, la quête du Graal ne réside pas dans la production d’un modèle qui va tout résoudre mais bien dans le développement d’une logique collective.

Ainsi, la production d’énergie citoyenne (notamment via la création d’une structure qui canalise l’épargne d’un groupe d’individus) est une réponse qui s’inscrit totalement dans la décroissance. Cela permet de produire ce dont on a besoin et de garder la maîtrise de sa consommation. Cette forme de décentralisation de l’énergie a sa place dans le futur modèle énergétique français. On peut imaginer les bienfaits de nombreuses initiatives via des boucles causales (circuit court, compost des déchets alimentaires, réseau de chaleur…), et ce dans les dimensions environnementales, sociales ou économiques (sans oublier la culture et la gouvernance).

Ayant utilisé le modèle #iSDG pour cerner la dynamique qui s’installe entre différents modules (population, alimentation…), il est possible d’amender ce modèle afin d’intégrer tous les enjeux auxquels nous sommes confrontés. Il est ainsi possible de comprendre les tenants et aboutissants d’une politique de 0 terres artificialisées ou encore les questions posées à un programme d’alimentation territoriale.

Si l’on suit les préceptes de la décroissance, sa mise en pratique devrait passer par la mise en place d’assises citoyennes sur les grands enjeux de société, assises non décrétées par l’Etat mais bien par les citoyens… La décroissance redeviendrait ainsi ce qu’elle a toujours été, un programme politique 🙂



La troisième voie du vivant

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Comme naviguer à contre-courant dans un monde fluctuant

Le culte de la performance conduit notre société à mettre en avant les valeurs de la réussite et de l’optimisation permanente dans tous les domaines. La lenteur, la redondance, l’aléatoire sont alors perçus négativement…

Auteur du livre La troisième voie du vivant (Éd. Odile Jacob), le biologiste Olivier Hamant tente de les réhabiliter en s’appuyant sur sa connaissance des processus du vivant. Que nous apprennent les sciences de la vie ? S’il existe bien des mécanismes biologiques remarquablement efficaces, des progrès récents mettent surtout en avant le rôle fondamental des erreurs, des lenteurs, des incohérences dans la construction et la robustesse du monde naturel. Le vivant serait-il alors sous-optimal ? En quoi une sous-optimalité d’inspiration biologique peut-elle constituer un contre-modèle au credo de la performance et du contrôle dans l’Anthropocène ? Face aux constats pessimistes et aux alarmes environnementales, il nous propose des pistes d’action pour éviter la catastrophe et esquisse des solutions pour un avenir viable et réconcilié avec la nature.

Olivier Hamant est chercheur à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) au sein de l’École normale supérieure de Lyon.

Biologiste interdisciplinaire, il a publié une centaine d’articles scientifiques, notamment sur les mécanismes cellulaires guidant la forme des plantes. Il dirige également l’Institut Michel-Serres et assure des formations sur la nouvelle relation de l’humanité à la nature.

Juin 2024

La page web

Projet de l’Observatoire de l’Anthropocène en vue des élections 2024 

Le dimanche 9 juin 2024, se dérouleront les élections européennes, fédérales et régionales belges.

Nous vous proposons de débattre de propositions alternatives, celles que les partis traditionnels ne vous proposent pas, ou de manière tellement édulcorées qu’elles ne signifient plus rien.

Cet agenda montrera la richesse des propositions citoyennes. Pour rappeler que la pensée unique de la croissance n’est pas la seule proposition économique à débattre en vue des élections du 9 juin 2024.

La présentation de ce projet se trouve sur notre blog : Juin 2024 – Contribution Zéro