Dorota Retelska
Dorota Retelska décrypte les nouvelles du climat. Docteure ès Sciences de l’UNIL, auteure d’Antarctique-Ouest dans le Vide, elle alerte sur les dangers du climat depuis plusieurs années. Elle est active dans plusieurs organisations de défense du climat, entre autres l’Association Climat Genève, Greenpeace, TACA, et le Collectif Climat 2020.
Le blog : https://blogs.letemps.ch/dorota-retelska/ – Liste de références dans la veille : cliquez ici.
Cet été, la Belgique et l’Allemagne ont connu d’impressionnantes inondations. Les victimes ont vécu des moments effrayants, des maisons entières ont été dévastées, et certains ont perdu la vie.
Le GIEC avait prévu que le réchauffement climatique causerait une augmentation du nombre d’inondations, et celle-ci a été observée dès 2013 déjà. La température de la Planète est montée rapidement en 2015 et 2016. A ce moment-là, l‘Organisation Météorologique Mondiale prévenait que nous étions entrés en territoire inconnu, où nous attendaient des catastrophes nouvelles. et au cours de des dernières années, les débordements suivant les pluies intenses se sont encore multipliés.
Depuis, la Terre a connu une succession de vagues de chaleur étonnantes, des ouragans plus forts, et des feux de forêt gigantesques.
Cette année, une vague de chaleur particulièrement étonnante, culminant à 49.6°C degrés, a touché le Canada, pays habituellement assez froid. Ce type d’événements était attendu aux environs de 2100. L’année passée, la Sibérie avait subi des températures à plus de 20°C au-dessus de la normale, et l’Australie a aussi vécu des très fortes vagues de chaleur, qui ont débouché sur d’immenses feux de forêt. Les pompiers australiens ont pu arrêter le feu aux portes des principales villes du pays.
Les habitants étaient évacués in extremis, et un tiers de la population de koalas australiens a disparu dans les brasiers.
Les climatologues sont inquiets, ils considèrent qu’après la vague de chaleur du Canada, d’autres événements semblables ou même plus forts sont possibles. Au début du mois d’août, la Grèce vit des records de chaleur qui ont dépassé 43°C.
Une première étude d’attribution a conclu que même en tenant compte du réchauffement, cette vague de chaleur devrait être exceptionnelle.
Il est possible aussi que cet événement signifie que le réchauffement climatique, ou ses manifestations les plus s’extrêmes, s’accélèrent.
L’augmentation des pluies intenses est surtout due au fait que l’humidité de l’atmosphère augmente de 7% par degré.
De plus, nous pourrions voir des périodes de sécheresse alterner avec des pluies intenses, et l’évaporation d’eau des mers plus chaudes accroît par endroits l’humidité de l’air.
Depuis quelques années, de plus gros orages ont été observés dans le monde, accompagnés de pluies très intenses. Cet été a apporté à l’Europe des dizaines d’orages de grêle, grosse ou géante, des vents ainsi que des tornades.
Le réchauffement climatique s’aggravera dans les années à venir. Il est bien possible que les inondations augmentent, que des torrents furieux coulent dans les rues des villes, que des bâtiments soient sapés par les eaux, les toits arrachés par des tempêtes, et que des grêles géantes ou des sécheresses annihilent les récoltes. La chaleur pourrait devenir un assassin invisible et soudain, et les températures pourraient avoisiner les 50°C.
Nous serons probablement prévenus 2-3 jours avant les catastrophes par les météorologues. A ce moment-là, nous devons disposer de solutions d’évacuation.
En Chine et en Inde, des inondations atteignent le premier étage des maisons, en emportent certaines. D’autres bâtiments chancellent après le reflux. Ils ne résisteront pas éternellement.
Nous devons prendre conscience du fait que nous perdrons de nombreux immeubles, que les inondations occasionneront des coûts colossaux en dévastant tout sur leur passage, que les transports seront souvent interrompus et l’approvisionnement deviendra de plus en plus hasardeux. Assez vite, les reconstructions seront abandonnées face à l’escalade des désastres. Les assurances ne pourront pas faire face à la quantité de sinistres. Les victimes perdront quasiment tout et il deviendra difficile de trouver un endroit sûr où recommencer car nul ne sera à l’abri.
Financièrement, il devient absurde de continuer l’économie de la croissance, car elle provoquera des dommages extrêmement coûteux, et les coûts humains seront terribles aussi. Il doit y avoir une autre solution, une réduction rapide d’émissions qui nous donne de bonnes chances de rester en vie.